
Pas de cohue pour le pot à Granby
À peine trois minutes après l’ouverture des portes, un premier client est ressorti du commerce avec un petit pot contenant du cannabis qu’il dit consommer à des fins médicales, « pour relaxer le soir ».
« Je suis surpris, je m’attendais à l’inverse », a commenté Michael Bergeron, en croyant devoir faire la file pendant de longues minutes avant de pouvoir entrer.
Celui-ci se réjouit toutefois de l’ouverture d’une succursale de la SQDC à Granby, neuf mois jour pour jour après l’ouverture des premiers commerces dans la province, ce qui diminuera significativement la distance à parcourir pour se procurer légalement du cannabis. « C’est pas mal moins loin de venir à Granby que d’aller à Drummondville ou Saint-Jean-sur-Richelieu », a-t-il plaidé, un constat que plusieurs ont partagé sur place.
Le Granbyen était loin d’être le seul à avoir surestimé l’achalandage du commerce à ses premières heures.
La première personne à s’être présentée devant le commerce est arrivée à 7 h 45, lundi matin, une bonne heure avant que quelqu’un d’autre ne se pointe le bout du nez. « Et je m’attendais a ce qu’il y ait déjà beaucoup de monde ! » lance le Césairois ayant refusé de se nommer à La Voix de l’Est.
Si personne ne s’est présenté au milieu de la nuit pour s’assurer d’être parmi les premiers clients de la succursale, certains se sont toutefois permis de déroger à leur routine pour répondre présent.
« Quand j’étais allé à l’ouverture [de la succursale] à Drummondville, je devais être le trentième en ligne. C’est pour ça que je m’étais levé tôt », a expliqué Jonathan Despars, qui a été le septième à se présenter.
Une stratégie qu’avait aussi adoptée Jason Fillion. « Je ne me lève jamais avant midi, et aujourd’hui, je me suis levé de bonne heure juste pour ça ! » a-t-il lancé.
Un travailleur de nuit a quant à lui repoussé le moment d’aller au lit pour faire une emplette à la SQDC.
Le fait que le magasin ouvrait ses portes à 10 heures le matin a fait dire à plusieurs que les clients passeraient plutôt après leur journée de travail. Quelques personnes se sont présentées avant l’heure prévue et ont tourné les talons après s’être butées à une porte fermée. D’autres ont fait le choix d’attendre patiemment dans leur voiture.

« On a raté le bateau »
La plupart des clients à qui nous avons parlé savaient très bien quels produits ils venaient se procurer. Aucun n’a indiqué avoir eu l’intention de se faire conseiller.
Pour Laurent, 54 ans, il s’agissait d’une première visite à vie à la SQDC, lui qui n’a pas honte de dire qu’il consomme du cannabis depuis l’âge de 16 ans. « C’est la première fois qu’on a l’opportunité d’avoir le choix ! » s’est-il exclamé.
Le prix des produits rebute plusieurs consommateurs rencontrés. Certains ont indiqué anonymement qu’ils continueraient à faire affaire avec leur fournisseur illicite.
Le Youtubeur Oli Jardins, qui anime la série Le Pot Show, ne voulait pas manquer l’ouverture d’un point de vente de la SQDC chez lui.
Il est d’avis que le Québec accuse du retard par rapport à d’autres provinces, comme l’Ontario. « Là-bas, la plus belle compagnie de cannabis, qui ne distribue pas ses produits au Québec, a investi 100 millions $ dans une campagne pour éduquer la population sur le cannabis. Il y en a une autre qui va distribuer un livre avec des conseils pour évaluer la qualité du cannabis. Elles ont compris que l’éducation, c’est la clé, relève-t-il. Au Québec, on limite la promotion que peuvent faire les entreprises de cannabis. [...] C’est un peu hypocrite car nous sommes la province qui consomme le plus. On a raté le bateau. Total. »
Syndicats en mode séduction
Des représentants de deux centrales syndicales, la CSN et le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) se trouvaient également sur place, lundi, afin d’approcher les employés du nouveau commerce dans l’optique qu’ils joignent leurs rangs.
« On syndicalise les magasins un par un, mais notre objectif serait de regrouper tous les syndicats en un seul pour négocier les mêmes conditions pour tout le monde », dit Katia Lelièvre, présidente du Syndicat des employé (es) de magasin et de bureau de la SAQ (SMB-SAQ CSN), qui a réussi à syndiquer les travailleurs de quatre magasins de la SQDC. Une autre succursale serait en voie d’être accréditée sous leur bannière.
« Le fonctionnement de la SQDC est très, très, très proche de ce qui se fait à la SAQ. On propose des solutions qui seraient viables pour la SQDC, car on les a déjà appliquées. »
D’autres succursales sont accréditées avec le syndicat des Travailleurs et des Travailleuses unis de l’alimentation et du commerce (TUAC). Le SCFP a de son côté déposé une requête pour syndiquer plusieurs succursales à la fois, y compris Granby.