
Meurtres à Acton Vale: pas de double peine maximale pour Francis Yergeau
Condamner Francis Yergeau à la prison à vie sans possibilité de libération avant 50 ans, comme l’a un temps demandé la Couronne, aurait été « exagérément disproportionné », a déclaré vendredi le juge Daniel Royer, de la Cour supérieure.
Cela aurait constitué un châtiment « cruel et inusité », « une peine arbitraire » en plus de « prolonger inutilement l’incarcération de M. Yergeau ».
La poursuite avait demandé en décembre dernier d’appliquer l’article 745.51 du Code criminel qui permet à un juge, depuis 2011, de prononcer des peines de prison à vie consécutives dans le cas de meurtres multiples.
Me Sandra Bilodeau et Me Pierre Goulet se sont toutefois ravisés quatre mois plus tard, ce qui n’empêchait pas le juge d’emprunter cette voie.
Décision
Ce n’est pas le cas. « Les objectifs traditionnels de la détermination de la peine, même ceux de dissuasion générale, de châtiment et de réprobation perdent pratiquement toute valeur fonctionnelle dès que la peine dépasse l’espérance de vie du délinquant », a précisé le juge Royer, siégeant au palais de justice de Saint-Hyacinthe.
De plus, une telle décision serait entrée en conflit avec le principe d’harmonisation des peines, a-t-il dit, puisque le complice de M. Yergeau, Giuseppe de Leto, a été condamné à la prison à vie sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans.
Au terme de procès séparés, les accusés ont tous deux été trouvés coupables de meurtres prémédités.
MM. de Leto et Yergeau, respectivement âgés de 37 et 40 ans, ont tué Nancy Beaulieu et Martin Bélair, un couple qui gérait un bar de danseuses nues à Saint-Hyacinthe, le 6 janvier 2015.
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Extorsion
Leur stratagème consistait à faire ensuite croire au copropriétaire du bar Le Flamingo que les disparus leur devaient une forte somme d’argent et qu’on devait les dédommager ou leur céder l’établissement.
Mais le plan a échoué et les deux Valois ont été arrêtés 16 mois plus tard.
Leur idée « n’avait pas la moindre chance de fonctionner », a dit le juge, et « deux vies ont été perdues pour rien ».
Les proches des victimes ont notamment témoigné en cour des nombreuses séquelles que la disparition de Mme Beaulieu et M. Bélair ont eues sur eux.
Interrogée à sa sortie de la salle d’audience, la sœur de Nancy Beaulieu, Véronique, s’est dite satisfaite de la sentence imposée à M. Yergeau « même si on en veut toujours plus ».
« Au moins, c’est une raison de moins pour lui d’aller en appel », a-t-elle mentionné.
Tant M. Yergeau et M. de Leto en appellent du verdict rendu contre eux, ce qui est presque automatique dans le cas de condamnations pour meurtre au premier degré.
Situation
Quoi qu’il en soit « les familles peuvent passer à autre chose maintenant », a commenté Me Sandra Bilodeau.
À son avis, le juge a « fait un travail consciencieux, car c’est une situation qui est loin d’être claire », la possibilité d’imposer des peines maximales consécutives étant interprétée différemment selon les tribunaux.
À la défense, Me Mathieu Rondeau--Poissant a estimé que la décision du juge Daniel Royer était « très bonne » et qu’il était d’accord avec « toutes ses conclusions ».
Plus corpulent que lors de son arrestation, Francis Yergeau a accueilli la décision sans réagir et ne s’est pas exprimé devant le tribunal.