Question de donner le ton aux témoignages livrés par les représentants de différents organismes au terme de la manifestation, le parc Davignon avait d’ailleurs changé d’allure. Une tente, symbole de l’itinérance, y avait été dressée et des sacs de couchage, disposés au sol. Des «poubelles-appartements» avaient également été ajoutées au décor pour illustrer l’état de vétusté de certains logis.
Selon Julie Coderre, conseillère budgétaire pour l’ACEF Montérégie-Est, la situation est loin de s’améliorer à Cowansville et dans les villes environnantes. Les ressources financières de certains citoyens ne sont tout simplement pas suffisantes pour se loger et manger à leur faim. « Le montant que certains reçoivent de l’aide sociale ne tient pas du tout compte du prix des loyers », dénonce-t-elle.
D’autres locataires sont plutôt aux prises avec des augmentations de loyer substantielles, entre autres liées à la fameuse clause F des baux. Cette dernière permet aux propriétaires d’immeubles construits il y a moins de cinq ans d’augmenter le loyer à leur guise.
En incluant les hausses liées à cette clause, le coût des logements a augmenté de 22% entre 2021 et 2022, à Cowansville, selon le directeur de la Corporation de développement communautaire de Brome-Missisquoi, Nicolas Gauthier.
« Ce sont des chiffres qui frappent. »
— Nicolas Gauthier
:quality(95)/cloudfront-us-east-1.images.arcpublishing.com/lescoopsdelinformation/4GG256F25VAJXDBB67EN2QWGDY.jpg)
Autre statistique: le taux d’inoccupation des logements est actuellement de 0,8% dans Brome-Missisquoi, souligne pour sa part Julie Coderre. Et ne cherchez pas un appartement de cinq pièces et demi: le taux chute à... 0%, semble-t-il.
La situation pourrait sûrement être différente, s’il n’y avait pas 578 logements affichés, certains de façon illégale, selon Mme Coderre, sur la plateforme Airbnb, dans Brome-Missisquoi.
Urgence d’agir
Les représentants de neuf organismes de Brome-Missisquoi, membres de la Table «logements», ont ainsi défilé à tour de rôle mardi au micro pour témoigner des effets de la crise du logement.
Cette dernière amplifie la problématique d’itinérance à Cowansville, affirme Annie Boulanger de la Cellule Jeunes et familles. « J’ai une mauvaise nouvelle à vous annoncer, a-t-elle déclaré. L’itinérance augmente et elle est visible maintenant. (...) On a des tentes et il y a des gens qui ont dormi à l’extérieur cet hiver. La cellule a dû s’adapter et faire de l’accompagnement. »
:quality(95)/cloudfront-us-east-1.images.arcpublishing.com/lescoopsdelinformation/SEOLQP3Q4ND6NEMQ5Z4VNQQDJI.jpg)
Le bilan est également sombre du côté du Centre femmes des Cantons. « Le constat est sans équivoque, dit sa représentante, Josiane Whittom. La crise du logement ne s’est pas seulement aggravée: elle est dramatique. Au Centre, les travailleuses rencontrent quotidiennement des femmes qui n’arrivent plus à se loger. (...) On a devant nous des femmes vulnérables, sans logement, parfois à une semaine d’être dans la rue, parfois déjà dans la rue. On n’a pas d’endroit sécuritaire pour elles et souvent, leurs enfants. »
Selon les représentants des organismes communautaires, l’augmentation du financement gouvernemental pour la construction de logements sociaux vient en tête de liste des solutions à privilégier.
« Le plus gros problème selon moi, c’est la disparition du programme Accès Logis, qui assurait la construction de logement social, dit Nicolas Gauthier. Maintenant, avec le Programme habitation abordable du Québec, c’est l’abordabilité qui est mise de l’avant. Ce qui ne garantit pas un accès aux populations les plus vulnérables ni l’abordabilité à long terme (sur 15 ou 20 ans). C’est le danger quand on confie au privé la construction et le développement de mesures sociales. »
Le zonage de certaines municipalités devrait permettre la construction d’unités accessoires, avance en outre le directeur de la CDC Brome-Missisquoi, pour favoriser une densification du territoire.
« Il y a une autre chose qu’on peut faire, et on le fait aujourd’hui, c’est de se mobiliser, lance Marie-Ève Godbout, d’Action Plus Brome-Missisquoi. C’est assez, ça n’a plus de bon sens. »