#MeTooScolaire, c’est «l’affaire» de tous!

LA VOIX DES LECTEURS / La semaine passée, le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, a annoncé le déclenchement d’une enquête générale en matière de violence sexuelle dans le réseau scolaire québécois. Cette annonce fait suite à plusieurs dénonciations d’agressions à caractère sexuel dans des écoles primaires et secondaires, notamment dans une école de Cowansville. Cette enquête permettra de faire un portrait de la situation dans tout le territoire québécois afin d’offrir des recommandations aux ministères concernés.


Le CALACS (Centre d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel) a pour mandat d’offrir de l’aide psychosociale aux femmes et filles de 12 ans et plus victimes de violence sexuelle. Chaque année, plusieurs adolescentes nous sont référées (81 jeunes en 2021-2022), majoritairement par le personnel scolaire, afin qu’elles puissent recevoir nos services.

Les situations où des jeunes sont victimes ou témoins de violence sexuelle ne sont pas rares; certaines agressions ont même été commises dans un établissement scolaire. Ces situations apportent leurs lots de conséquences pour ces jeunes et dans l’établissement scolaire (intimidation, rumeur, etc.), ce qui incitent parfois des adolescentes à changer d’école pour ne plus avoir à faire face à leur agresseur quotidiennement. Le personnel scolaire ressent parfois un sentiment d’impuissance face à l’ampleur de la situation.

La responsabilité de protéger ces jeunes nous revient à tous, mais le ministère de l’Éducation se doit de se responsabiliser, et vite!

Le #MeTooScolaire, créé par le collectif La Voix des Jeunes Compte, existe depuis 2018. Jusque-là, plusieurs cas de violence sexuelle avaient été dénoncés, mais l’urgence sociale d’agir a semblé être ignorée.

En 2017, la loi visant à prévenir et à combattre les violences à caractère sexuel dans les établissements d’enseignement supérieur fut instaurée. Toutefois, malgré que les établissements primaires et secondaires du Québec soient dans l’obligation de fournir de l’éducation sexuelle aux élèves depuis septembre 2018, les écoles secondaires n’ont pas d’obligation légale encadrée par une loi spéciale comme c’est le cas pour les cégeps et universités.

En d’autres mots, la responsabilité de protéger les jeunes est un peu devenue une patate chaude dont personne ne veut. Il aura fallu que les cas de dénonciations se multiplient pour que des actions soient posées.

On entend parler d’enseignants qui profitent de leur position d’autorité, d’initiations sportives humiliantes et dégradantes auxquelles se mêlent des gestes de nature sexuelle inacceptables, de jeunes qui dévoilent des agressions sexuelles à des intervenants scolaires et que leur cas n’est même pas signalé à la DPJ «parce qu’on sait déjà que le signalement ne sera pas retenu» ou bien «parce que la situation ne correspond pas à la définition légale d’une agression sexuelle dans le Code criminel».

M. Drainville, le CALACS prend de l’avance et vous soumet déjà quelques recommandations, gratos à part de ça!

Il est primordial de former tout le personnel scolaire (personnel enseignant, direction, personnel de la santé et même le personnel de maintenance) à savoir comment faire face à un dévoilement, mais également pour se conscientiser des préjugés face à la problématique de la violence sexuelle.

Le ministère doit fournir une procédure claire (et qui soit la même pour tout le réseau scolaire) quant à la réception d’un dévoilement d’agression sexuelle. Qui doit être prévenu? Qui doit faire le signalement à la DPJ? Quand et pourquoi faire un signalement?

Actuellement, les différents intervenants se lancent la balle et il arrive régulièrement que le CALACS reçoive des références de jeunes victimes sans que le signalement n’ait été fait. Il faut rappeler l’obligation de signaler les cas (et même les possibles cas) d’abus sexuels à la DPJ.

D’ailleurs, il est important de s’assurer que les écoles offrent une éducation sexuelle de qualité (dans son contenu) aux élèves.

Actuellement, les écoles décident de comment et par qui les contenus sont offerts aux élèves, mais certaines notions sont délicates à aborder et ce n’est justement pas tout le monde qui est à l’aise de parler de violence sexuelle. Des partenariats avec des organismes spécialisés sont une option intéressante et une belle façon de faire connaître les ressources qui s’offrent aux jeunes.

Faut-il le rappeler? Les CALACS possèdent et offrent le programme Empreinte qui vise la prévention des agressions à caractère sexuel pour les élèves et le personnel scolaire. Ça tombe bien en plus parce qu’il cadre parfaitement avec le contenu obligatoire en matière de violence sexuelle dans le programme prévu pour l’éducation à la sexualité!

Que ce soit pour des besoins de prévention de la violence sexuelle, de défense de droits ou bien d’aide psychosociale, le CALACS est là : 450 375-3338

Nous sommes de tout cœur avec ces jeunes courageuses qui brisent le silence. Vos voix permettent de regarder vers l’avenir!

Isabelle Corbin,

Intervenante / Agente de prévention et de communication au CALACS des Rivières Haute-Yamaska Brome-Missisquoi