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Le jugement a été rendu mercredi. Simon Houle doit se livrer aux autorités carcérales au plus tard le 30 janvier afin de purger sa peine.

«Tout bien pesé, la Cour est d'avis que M. Houle mérite des peines d'emprisonnement de 12 mois pour le chef d'accusation d'agression sexuelle et de deux mois sur le chef de voyeurisme», peut-on lire dans la décision du Tribunal.

Les deux peines sont à purger de façon concurrente compte tenu du lien étroit qui existe entre elles.

L’ingénieur de 31 ans avait plaidé coupable aux deux chefs d’accusation en 2019. Il a reconnu avoir agressé sexuellement la plaignante, en plus de prendre des photos de ses parties intimes, après une soirée arrosée dans un bar de Trois-Rivières.

Le juge de la Cour du Québec, Matthieu Poliquin, avait toutefois prononcé une absolution conditionnelle en juin 2022. Les raisons de cette décision détaillées dans le jugement ont causé une véritable onde de choc au Québec. Le magistrat nommé en septembre 2021 a essuyé de nombreuses critiques.

Après révision du dossier, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) avait demandé à la Cour d’appel de corriger cette peine «manifestement déraisonnable» considérant la gravité des crimes de l’ingénieur.

La peine de Simon Houle a été débattue devant trois juges au mois de décembre 2021, ceux-ci se sont finalement rangés derrière les arguments du DPCP, qui estimait que Houle méritait une peine de 15 à 18 mois de prison.

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Crimes «sérieux»

Il a été déterminé que «l’ensemble des circonstances ne comprendrait pas que M. Houle puisse échapper à la condamnation», écrivent les juges de la Cour d’appel.

«En somme, les crimes commis par M. Houle sont sérieux. Il a abusé de la vulnérabilité de la victime et a porté gravement atteinte à son intégrité physique et sexuelle ainsi qu’à sa vie privée et à sa dignité», ajoutent les magistrats.

Dans sa décision de juin, le juge Poliquin avait écrit que les crimes de l’ingénieur se résumaient à «un seul évènement, lequel se déroule somme toute rapidement». Il avait aussi mentionné que l’état d’ébriété de Simon Houle pouvait expliquer son comportement, sans toutefois le justifier. Donc, cet évènement ne méritait pas des conséquences aussi graves qu’un casier judiciaire, qui lui nuirait au travail.

Les juges de la Cour d’appel ne sont pas de cet avis.

«L’écart entre l’absolution conditionnelle et les peines infligées dans des cas où la gravité subjective des infractions et le degré de responsabilité du délinquant sont semblables est trop important pour ne pas risquer de miner la confiance du public.»

Contrairement au juge Poliquin, la Cour d’appel ne retient pas l’âge de l’accusé ni l’absence d’antécédents judiciaires en matière de violence comme facteurs atténuants.

«Rappelons que ce dernier avait 27 ans lors de la commission des infractions […] et s’était déjà livré à des attouchements sexuels sur une jeune femme endormie. Les gestes qu’il a commis à l’égard de la victime ne peuvent être assimilés à une erreur de jeunesse ou à un accident de parcours», conclut le Tribunal.

La Cour d’appel retient tout de même quelques facteurs atténuants, tels que le plaidoyer de culpabilité, les remords et excuses sincères de l’accusé, le processus thérapeutique entrepris avec sérieux ainsi que son profil personnel et professionnel «malgré tout positif».

Comme facteurs aggravants, la cour mentionne l’abus de vulnérabilité, les conséquences importantes sur la victime, le nombre de photos prises de la victime et le fait que l’accusé ait continué d’agresser la victime malgré que celle-ci se soit sauvée de lui.

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Erreurs du juge Poliquin

Les juges de la Cour d’appel ne manquent pas de souligner les erreurs commises par le juge Poliquin dans leur décision.

Ils estiment que ces erreurs du juge débutant ont «fait en sorte de diminuer la gravité subjective des infractions et le degré de responsabilité de M. Houle», en plus d’entraîner «une peine qui ne respecte pas le principe fondamental de la proportionnalité».

Le juge Poliquin n’aurait pas dû qualifier l’agression sexuelle de gestes «contextuels et ponctuels» dans la vie de Simon Houle, puisqu’il avait admis avoir touché les parties génitales d’une autre femme en 2015.

Concernant le caractère «rapide» de l’évènement, les juges de la Cour d’appel rappellent que l’ingénieur a eu le temps de prendre neuf photos des parties intimes de la plaignante dans deux endroits différents de l’appartement, ce «qui n’a rien de rapide».

La Cour d’appel estime que le juge Poliquin «a perdu de vue» l’infraction de voyeurisme au moment de déterminer la peine, celle-ci est d’ailleurs passible d’un maximum de cinq ans d’emprisonnement. Il n’a pas retenu l’atteinte à la vie privée et la dignité de la victime dans les facteurs aggravants.

En novembre 2022, les plaintes contre le jeune juge Poliquin n'ont pas été retenues par le Conseil de la magistrature. Aucune sanction ne lui sera donc imposée, comme il n'y a eu aucun manquement déontologique dans le dossier de cette absolution conditionnelle.

Le Conseil de la magistrature admet qu'il a commis des erreurs dans son jugement, mais maintient qu'il n'y a pas eu d'erreur de conduite.

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Le 21 juin 2022, la décision du juge Matthieu Poliquin d’accorder une absolution conditionnelle à Houle avait soulevé une vague de colère à travers le Québec. Le magistrat a été nommé en septembre 2021 à la chambre criminelle de la Cour du Québec à Trois-Rivières.

Le Directeur des poursuites criminelles et pénales veut en appeler de cette décision et soulève quatre erreurs de principe commises selon lui par le juge Poliquin. Le DPCP demande à la Cour d’appel de corriger cette peine «manifestement déraisonnable». Aux yeux du DPCP, les crimes de Houle devraient lui valoir une peine entre 15 et 18 mois de prison.

Résumé des faits

Le 1er novembre 2021, l’ingénieur Simon Houle, 30 ans, a plaidé coupable aux accusations d’avoir agressé sexuellement une amie ainsi que de voyeurisme, pour avoir subrepticement produit des photos des parties génitales de la victime.

Les crimes ont été commis en 2019, après une fête bien arrosée dans un bar de Trois-Rivières. Houle et la jeune femme de 24 ans se rendent au logement d’un ami. Les deux auront une discussion émotive au sujet d’un de leur parent décédé. La jeune femme appelle sa mère qui propose de venir la chercher. Simon Houle rassure la mère : il prendra soin de sa fille.

La jeune femme s’endort ensuite tout habillée, couchée sur les couvertures d’un lit.

Houle en profite pour détacher le soutien-gorge de la jeune femme et glisser ses doigts dans le vagin de sa victime avant de faire des mouvements de va-et-vient. Il manipule son téléphone cellulaire et prend des photos des gestes. «Il a immortalisé son agression», résume la procureure de la Couronne Me Eve-Lyne Goulet.

La victime se réveille en voyant la lumière de la caméra. Elle replace son soutien-gorge et sort de la chambre pour aller se coucher sur le plancher de la cuisine. Elle se souvient que Simon Houle l’a prise dans ses bras et ramenée dans le lit.

L’analyse du téléphone cellulaire révélera que Houle a pris des photos des parties génitales de la jeune femme alors qu’elle était couchée sur le plancher de la cuisine et aussi allongée sur un sofa.

Un ami de la victime a découvert les neuf photos dans la corbeille du téléphone cellulaire de Houle.

Les photos seront restées accessibles pendant 44 jours, soit jusqu’à la plainte de la victime et à la perquisition policière.

La victime a témoigné avoir subi de graves conséquences de l’agression. Elle a notamment dû être hospitalisée en psychiatrie pendant une semaine.

L'employeur de Simon Houle, le Groupe Caninex à Drummondville, a congédié l'ingénieur quelques jours après la médiatisation de l'absolution conditionnelle à un don de 6000$.

Les erreurs du juge selon la Couronne

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Dans sa décision, le juge Poliquin décrivait les crimes de Houle en parlant « d’un seul évènement, lequel se déroule somme toute rapidement ».

Il s’agit d’une grave erreur d’appréciation, selon la Couronne, car 24 minutes s’écoulent entre la prise de la première et de la dernière photo des parties génitales de la victime.

La Couronne reproche aussi au juge de n’avoir pas tenu compte de «l’acharnement» dont a fait preuve l’accusé, qui a pourchassé la victime même si elle tentait de fuir l’agression.

Le juge Poliquin a aussi écrit que l’état d’ébriété expliquait le comportement de l’accusé, sans le justifier. «Mais de dire que ça explique, ça vient nécessairement amoindrir un peu sa culpabilité morale en reportant la responsabilité sur l’alcool», souligne Me Eve-Lyne Goulet.

Le juge Poliquin n’a pas considéré comme un facteur aggravant l’aveu fait par l’accusé qu’en 2015, il avait aussi commis des attouchements sur une femme endormie. Aucune plainte n’avait été portée à la police à ce moment. Le juge Poliquin qualifie cette déclaration de «transparence» de l’accusé.

Pour la Couronne, le fait aurait plutôt dû compter comme un facteur aggravant. «Mais on peut le pondérer, car il vient de la transparence de l’accusé», précise Me Goulet.

Au final, la Couronne n’exclut pas l’absolution pour tous les accusés coupables d’agression sexuelle. «Mais il faut des cas spécifiques, avec une gravité subjective moins grande, et ce n’est pas notre cas ici», affirme la procureure de la Couronne.

Geste ponctuel

Simon Houle n’était pas présent en Cour d’appel. Son avocat Me Pierre Spain a rappelé que les juges d’instance ont toute la latitude pour imposer la peine qu’ils jugent appropriés. La Cour d’appel ne peut intervenir lorsqu'une erreur de principe a eu une incidence sur la peine.

Me Spain ne voit pas de telle erreur dans la décision du juge Poliquin.

«Quand le juge dit «somme toute rapidement» ce n’est pas pour minimiser, c’est pour dire que ce ne sont pas des gestes qui ont été faits à plusieurs reprises sur une grande période de temps, argumente l’avocat.C’était un geste ponctuel, arrivé à un certain moment, qui a duré un certain temps.»

La juge Suzanne Gagné a demandé à la défense où, dans les motifs du juge, on retrouvait le nombre de photos prises par l’accusé et la durée durant laquelle il les a gardées, deux éléments que la Couronne considère comme aggravants. L’avocat a eu une réponse évasive.

«Vous ne pouvez pas faire dire au jugement ce qu’il ne dit pas», convient la juge Gagné, d’un ton bref.

Concernant l'événement de 2015 au cours duquel son client admet avoir fait des attouchements sexuels à une autre femme endormie, Me Spain met la Cour en garde de tirer des conclusions. «On n'a pas le contexte», soumet l'avocat de la défense. «Y a-t-il un contexte qui justifie ça?», rétorque aussitôt le juge Guy Gagnon.

Au terme du débat qui a duré un peu plus d'une heure, les juges ont annoncé «qu'ils allaient prendre un peu plus de temps pour réfléchir» et ont donc mis le dossier en délibéré.

Accusé de bris de probation

Simon Houle a comparu il y a quelques jours à Saint-Jérôme pour être accusé de bris à son ordonnance de probation. Le 4 juillet, deux semaines après son absolution conditionnelle, Houle aurait empoigné les fesses d’une femme lors d’un voyage à Cuba. Il a enregistré un plaidoyer de non-culpabilité.

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Celles-ci sont en effet considérées non recevables. Aucune sanction ne lui sera donc imposée.

Dans sa décision de sept pages, le Conseil de la magistrature rappelle d’emblée que chacun est libre d’exprimer ses opinions et ses critiques sur les décisions des tribunaux. Or, «le Conseil n’est pas un organisme d’appel ou de révision et qu’il ne peut d’ailleurs exprimer quelque commentaire approbateur ou désapprobateur sur la justesse d’une décision rendue». Dans le système de justice, ce sont les tribunaux d’appels qui ont la tâche de corriger s’il y a lieu des erreurs de droit ou de fait commises par les juges de première instance.

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Son rôle est donc semblable à celui d’un comité de discipline. Il consiste à encadrer la conduite des juges sur un plan déontologique uniquement, ce qui signifie leur conduite et leur comportement et non le contenu de leurs décisions.

Dans le cas présent, les plaintes examinées par le Conseil de la magistrature ne visaient aucun manquement de nature déontologique du juge, mais alléguaient plutôt qu’il aurait commis des erreurs dans son évaluation des faits d’un dossier ainsi que dans son analyse du droit et des facteurs ou critères pour déterminer la peine appropriée.

Elles concernaient strictement le jugement rendu. On lui reprochait d’avoir utilisé le mot «disproportionné» pour qualifier les conséquences d’un casier judiciaire pour Simon Houle, «le fait que l’aveu d’une deuxième agression démontre le désir de transparence de l’agresseur», de souligner que l’agression s’est déroulée «somme toute rapidement», que l’ivresse de l’agresseur permet «d’expliquer le comportement de ce dernier», qu’il ait précisé que l’agresseur serait une personne de «bonne moralité», et le passage du jugement où les crimes de l’agresseur sont décrits comme «ponctuels et contextuels» dans sa vie.

Rappelons que Simon Houle avait déshabillé la victime alors qu’elle avait les facultés affaiblies et dormait avant d’introduire ses doigts dans son vagin et il avait pris des photos de son corps.

Or, aucune plainte logée au Conseil de la magistrature ne concernait la conduite du juge.

Le Conseil de la magistrature dit constater que «le magistrat n’a pas commis de manquement aux obligations déontologiques et qu’il ne lui revient pas de statuer sur les divers griefs formulés à l’encontre de la décision judiciaire rendue».

Ce même Conseil prend toutefois le temps de mentionner que les reproches à l’endroit du juge Poliquin sont de la même nature que ceux contenus à la procédure du Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) qui a déposé, à la Cour d’appel du Québec, une requête demandant l’autorisation de se pourvoir de la peine prononcée par le juge dans ce dossier. Ainsi, comme le veut la procédure normale, ce sera au DPCP de faire avancer le dossier, lui qui réclamait 15 à 18 mois d’emprisonnement. Le tribunal doit décider le 9 décembre prochain s’il accepte d’entendre cet appel ou non.

L’organisme rappelle que les juges eux-mêmes bénéficient aussi de la liberté d’expression, «un attribut essentiel de l’indépendance judiciaire décisionnelle de chacun d’eux» et ajoute qu’il ne doit pas décourager les juges «d’exprimer des opinions sincères, bien qu’impopulaires».

Par ailleurs, tel que mentionné précédemment, une nouvelle accusation vient d’être autorisée contre Simon Houle, soit celle de ne pas avoir respecté les conditions de sa probation imposées dans le cadre de son absolution conditionnelle qui l’obligeaient à garder la paix et avoir une bonne conduite. Cette accusation fait suite à l’enquête policière portant sur une allégation d’inconduite sexuelle survenue dans un bar de Cuba dans la nuit du 3 au 4 juillet dernier où le suspect aurait empoigné les fesses d’une femme. Sa comparution aura lieu au palais de justice de Saint-Jérôme.

Cet événement serait survenu quelques jours après la décision du juge rendue le 21 juin 2022.

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