À tant se crever à l’ouvrage, les employés de Twitter vont-ils finir plus riches, plus en forme, plus heureux? Je ne parierais pas la facture d’épicerie de la semaine là-dessus. N’empêche, ce credo de la haute performance à tout prix, les personnages de la télésérie Avant le crash l’ont suivi à la lettre pour finir par se perdre.
Aveuglés par le pouvoir et l’argent, les ambitieux financiers d’Olstrom n’ont pas lésiné sur les heures de travail pour «closer des deals», entre deux scotchs, quitte à rentrer aux petites heures à la maison.
Le dixième et dernier épisode de cette excellente télésérie, coécrite par le couple Kim Lévesque-Lizotte et Éric Bruneau, a connu sa conclusion lundi soir sur ICI Radio-Canada Télé, dans un feu d’artifice de règlements de comptes professionnels et personnels. Avec un titre pareil, ça pouvait juste mal finir. Un crash, on s’entend, ça se termine rarement bien.
D’un crash à l’autre
Dans cet ultime et intense volet - attention, alerte au divulgâcheur – Marc-André (Éric Bruneau) sort des décombres plutôt amoché. Tout lui explose en pleine poire, même lorsqu’il pense faire la bonne chose. À commencer par l’idée de faire dérailler un lucratif contrat en voulant venir en aide à une employée victime d’agressions sexuelles par le vil homme d’affaires Bernard Dupont (Guy Nadon).
Sa tentative de se refaire financièrement, afin d’acquitter sa dette au fisc et se racheter auprès de sa mère sans le sou (Annick Bergeron), grâce à l’achat de l’assurance-vie du père mourant (Marc Messier) de son pote Vincent (Benoît Drouin-Germain), lui reviendra aussi en plein visage.
Exit Dominique la cougar
Tant qu’à faire du ménage, Marc-André a aussi eu le cran de mettre un terme à sa relation toxique avec sa cougar de patronne, de 20 ans son aînée, Dominique (Marie-France Marcotte) qui le tenait par vous savez quoi.
Elle se retrouvera, pour son plus grand malheur, avec une plainte pour harcèlement sexuel au bureau du RH, dans une scène illustrant bien le décalage entre le traitement réservé aux femmes et aux hommes dans le monde du travail.
On apprendra aussi d’où vient ce visage tuméfié que Marc-André a arboré au fil de la série, lors de ses confessions frontales à la caméra. On devinait qu’il avait mangé une volée, restait à en connaître l’auteur et le commanditaire.
Et comme si ce n’était pas suffisant, l’ancien adepte de la simplicité volontaire a décidé d’aller rejoindre dans sa nouvelle demeure la fougueuse Évelyne (Karine Vanasse), qui a décidé de larguer son hypocrite de mari (Émile Proulx-Cloutier). Lui aussi tombera de haut.
Parmi les décombres du crash, n’oublions pas les pauvres Vincent, devenu millionnaire mais orphelin de ce père qu’il a tant voulu impressionner, et Patrick (Mani Soleymanlou), le coeur en mille miettes de voir la mère de ses enfants le larguer pour une autre femme.
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Il est où le bonheur?
Impeccable à tous les niveaux, que ce soit dans sa distribution, ses dialogues et sa réalisation soignée, fruit du travail de Stéphane Lapointe, Avant le crash a judicieusement su respirer l’air du temps et surfer sur des thèmes d’actualité, comme le harcèlement sexuel, le mouvement #MoiAussi, la cupidité comme moteur de vie, la quête de reconnaissance ou l’appât du gain facile.
Au bout du compte, on comprend que tenter de faire partie du 1% des mieux nantis de la société ne se fait pas sans dommages collatéraux. Il arrive quoi au bonheur dans ce temps-là? Il sacre son camp.
La série a aussi montré les ravages de cette philosophie vénale sur la jeune génération, avec la très lucide ado Florence (Irlande Côté, une révélation) qui se met coquinement en scène sur le net afin de faire le coup d’argent qui, croit-elle naïvement, lui permettra d’être libre à tout jamais.
Un autre beau miroir aux alouettes. L’argent est un bon serviteur, mais un bien mauvais maître, a déjà dit un certain Alexandre Dumas.
Une suite en écriture
On se réjouit d’apprendre qu’une deuxième saison est en cours d’écriture, même si Radio-Canada n’a pas encore donné son feu vert. Plusieurs intrigues restent en suspens.
Marc-André réussira-t-il à réparer les pots cassés avec sa mère alcoolique? Évelyne la dominatrice au lit lui fera-t-elle subir une prise de tête érotico-maso entre ses musculeuses cuisses? La frustration dans le plafond, François obtiendra-t-il la garde exclusive de bébé Denis? Le millionnaire cochon Bertrand Dupont continuera-t-il à jouer les Harvey Weinstein?
Restera toutefois à changer le titre pour Après le crash...