Brian Tyler: l’histoire et le blues

Brian Tyler a livré sa version de l'histoire du blues, samedi soir, à la salle Odyssée de Gatineau.

Dans les champs de coton du sud des États-Unis, les esclaves chantaient de l’aube au crépuscule. Ces chants n’avaient rien de joyeux, bien au contraire. Mais ils étaient certainement promesses de liberté.


C’est la prémisse sur laquelle Brian Tyler décline son tout nouveau spectacle, L’histoire du Blues, présenté samedi soir à la salle Odyssée de Gatineau.

Le bluesman nous raconte à sa manière l’histoire du blues; l’histoire des Noirs et de leurs chansons-signal dont les textes cachaient un code pouvant conduire les esclaves vers la liberté.

C'est dans la peau d'un esclave noir du nom de Woodford Laurence que Brian Tyler ouvre son spectacle, <em>L'Histoire du blues.</em>

Sans dévoiler le punch, on comprend rapidement le lien qui existe entre Brian et le personnage central de son histoire — un esclave dénommé Woodford Laurence — qui ouvre le spectacle sous les coups de fouet et le bruit des chaînes.

Après cette leçon d’histoire dont la mise en scène aurait avantage à être resserrée, on entre dans les juke joints de la Louisiane, de Kansas City et de Chicago. C’est là que tout le talent de Tyler se dévoile. Celui qui se compare à un «chanteur de karaoke victime du syndrome de l’imposteur» prouve hors de tout doute qu’il est plutôt un grand chanteur de blues. 



Tout en émotion

Voilà pour la trame du spectacle. Maintenant, qu'en est-il de l’expérience vécue tout au long de la soirée? 

Pour cette première partie du spectacle, l’artiste navigue allègrement dans les répertoires de Robert Johnson, Muddy Waters, Bo Diddley, Ray Charles et de plusieurs autres

Disons d’emblée que Brian Tyler est un excellent conteur. Les pages d’histoire se mélangent agréablement aux anecdotes personnelles du chanteur, ce qui offre une déclinaison qui coule doucement, tout comme l’eau du Mississippi. 

L’émotion est parfois à fleur de peau, comme ce fut le cas lors de l’interprétation du classique de Ray Charles, Georgia on my Mind

«Je chante cette chanson depuis des années et je crois l’avoir jamais interprété de la même façon, confie-t-il. Mais chaque fois, j’ai l’impression que ma mère descend de son nuage pour me flatter le dos».

Et son interprétation de samedi soir n’a, à l’évidence, pas échappé à sa maman puisque le colosse a fondu en larmes, étouffé par l’émotion. Heureusement pour lui, le rideau est tombé sur la première partie du spectacle.

Brian Tyler

Touche de modernité

Au retour de la pause, le blues moderne prend toute la place. La musique de Chuck Berry, B.B. King, Elvis Presley, Stevie Ray Vaughn, Jeff Healey et Offenbach («parce qu’il faut bien un peu de blues en français», dit-il) illumine la scène. Même les musiciens ont laissé leurs costumes et instruments d’époque dans la loge pour offrir une puissante performance poussée par l’amplification.

Parlant des musiciens, on a senti toute la soirée l’admiration que leur voue le chanteur. Il ne manque jamais une occasion de faire briller l’un d’eux, que se soit pendant les solos de guitare ou de clavier. 

Pascal Mailloux aux claviers, Éric Rock à la guitare — ce dernier accompagnait le groupe pour la première fois en remplacement de Christian Martin — Bernard Deslauriers à la batterie et Simon Daigle à la contrebasse et à la basse électrique sont quatre maestros du blues qui ajoutent chacun à leur façon une pièce importante de la trame historique ici racontée.

La scène de la transformation dans un décor d'ombre chinoise est particulièrement réussie.

Le meilleur est à venir

L’Histoire du Blues est un spectacle encore très jeune. Le rodage n’est évidemment pas terminé mais à terme, cette proposition sera vraiment efficace.

Aussi, le journaliste ainsi que certains voisins de siège auraient apprécié un petit feuillet présentant les personnages et les grandes lignes de la trame historique, cela permettrait certainement de resserrer l’intro du show qui est, au demeurant, nécessaire.

Ceci explique sans doute la timidité de la foule en début de spectacle. Mais, les détenteurs de billets ont rapidement repris vie juste avant le lever de rideau, lors de la métamorphose de Brian Tyler l'animateur à Brian Tyler le chanteur de blues — très bon flash, cette ombre chinoise. 

Par la suite, l’ambiance feutrée du juke joint a fait son oeuvre. Et la magie de Brian Tyler a opéré!

Courez voir ce spectacle qui se déplace à Longueuil, vendredi, pour deux heures de pur bonheur. Bien sûr, la musique y est omniprésente mais il est intéressant de remonter le fil du temps pour (re)découvrir un style musical qui fut la pop d’une certaine époque, et qui, aujourd’hui, est malheureusement boudée par plusieurs instances.