Un homme fascinant et ses bêtes de film [VIDÉO]

Jean Cardinal a une grande complicité avec ses animaux.

Charismatique. C’est le premier mot qui vient en tête après une rencontre avec l’entraîneur animalier Jean Cardinal dans son repère de Sainte-Anne-de-la-Rochelle, en Estrie. Depuis plus de 40 ans, il fait briller sous les projecteurs ses complices à poils, à écailles et à plumes dans des productions cinématographiques tous azimuts. L’amoureux des bêtes prend à son tour la vedette devant la caméra dans le cadre d’une série diffusée à Canal D.


Il suffit d’observer Jean Cardinal interagir avec ses pensionnaires du Ciné-Zoo pour prendre la mesure du lien indéfectible qui les unit. Il a une affection sans borne pour chaque individu : Tango le grizzly, les tigres Taj et Sushi et Tao, le roi de la jungle, sans compter son corbeau, ses singes et sa meute de loups, pour n’en nommer que quelques-uns.

Taj le tigre.

Il n’a pas hésité à plonger dans l’aventure devant la lentille à leurs côtés. « Mes animaux, ce sont mes célébrités. C’est une énorme fierté. En acceptant de participer à la série, je veux montrer la chance que j’ai dans la vie. Ma carrière est basée sur mon amour des animaux. Et je suis convaincu qu’on va sentir cette passion à l’écran. »



La série documentaire Bêtes de film prendra son envol à Canal D dès le 15 septembre à 19 h 30. En raison des liens contractuels avec la production, le spécialiste animalier ne peut pas dévoiler le contenu de la quinzaine de jours de tournage réalisé jusqu’ici. Jean Cardinal se dit toutefois très satisfait du travail du réalisateur Michel Beaudin et son équipe. « On m’a laissé carte blanche. Et c’est exactement ce que je voulais. C’est naturel, fluide, dit-il. Je me dévoile à des gens qui sont prêts à m’écouter. C’est rassurant parce que c’est fait avec beaucoup d’humanité, d’ouverture. »

Tango le grizzly.

Malgré toute son expérience, l’entraîneur animalier confie avoir eu des papillons dans l’estomac lorsqu’on a braqué les projecteurs sur lui. « J’ai toujours le trac quand je vais sur un plateau, concède l’homme de 70 ans doté d’un incroyable bagou. Une fois que j’ai fait la première prise, la pression tombe. Oui, le documentaire porte sur moi. Mais je ne suis pas seul. Il y a les animaux. On est indissociables. Ils font partie de moi et l’inverse est aussi vrai. »

Déclic

Dès sa prime jeunesse, Jean Cardinal a commencé à s’intéresser à tout ce qui gravite autour du règne animal. Tel un éthologue, il voulait tout savoir à propos des bêtes qui l’entouraient. « J’avais quatre ans et je jouais avec des insectes, des couleuvres, des grenouilles et des tortues. Mon but dans la vie était de les observer, les découvrir, voir comment ils s’en sortent dans la vie. L’étude du comportement animal, j’ai fait ça durant toute mon existence. Et ça me passionne comme au premier jour. C’est un univers fascinant. »

L’entreprise Ciné-Zoo s’enracine depuis 1998 sur un site de 100 acres.

Le déclic de jumeler son amour des bêtes à celui du cinéma a eu lieu en 1979. Jean Cardinal était alors propriétaire d’une animalerie. « J’avais des spécimens que les autres n’avaient pas. Des primates, des perroquets, des tarentules, des serpents, des iguanes, des caméléons. Ça piquait la curiosité de bien des gens à l’époque, se remémore-t-il. Au point où La Presse a fait un reportage sur moi. Je me suis mis à avoir des appels de productions québécoises. Ma carrière était lancée. »



En 1998, il établit son entreprise Ciné-Zoo, ouverte au public, sur un vaste site de 100 acres au cœur d’une luxuriante nature à Sainte-Anne-de-la-Rochelle. « Ici, c’est mon oasis et celui des animaux. J’y tiens beaucoup. »

Tao le lion.

Vivre de sa passion n’a toutefois pas été un long fleuve tranquille. « J’ai été au pied du mur à plusieurs reprises, image le spécialiste. Le cinéma, c’est cyclique. Tantôt, les contrats s’enchaînent, puis ensuite plus rien pendant un bout. J’ai dû faire de grands sacrifices pour garder le cap. J’ai vendu ma chaloupe, ma moto, des antiquités qui appartenaient à ma famille. Mais, j’aime tellement ce que je fais que ça ne me dérange pas. Je me retrousse les manches et je continue. »

L’entraîneur animalier au bagou incroyable a mille et unes anecdotes de tournages à raconter.

Au fil des décennies, Jean Cardinal et ses acolytes ont côtoyé des vedettes du cinéma et du petit écran aux quatre coins du globe. « Je dois au moins avoir fait plus de 1000 tournages. J’ai pas mal de millage dans le corps », lance celui qui passe graduellement le flambeau à son fils Olivier.

Respect et complicité

On pourrait croire que Jean Cardinal entraîne ses acolytes à poils, plumes et écailles sous la menace pour arriver à ses fins. Or, c’est tout le contraire. « Je suis en quelque sorte un mentor qui dirige les animaux. Quand je regarde un grizzly en face de moi, je sais ce qu’il pense dans sa tête. Je sais ce qu’il veut et jusqu’où je peux aller. Il ne faut jamais contrarier un animal, tu dois l’amener à jouer avec toi. »

En fait, la complicité entre l’homme et ses pensionnaires se développe alors qu’ils sont tout jeunes. « Tu ne peux pas prendre un ours ou un tigre à huit mois et faire ce que je fais. Leur instinct de bête sauvage est beaucoup trop développé. Ça fait partie de leur ADN. Mais, quand tu les prends bébés, ils ont du respect envers toi. Tu les as sevrés, nourris. Ce contact direct établit que c’est moi qui dirige. »

Même le corbeau fait son cinéma.

Plusieurs espèces finissent toutefois par faire fi des consignes de leur entraîneur sur les plateaux de tournage en vieillissant. C’est notamment le cas de plusieurs singes. « Après deux ans, ça ne fonctionne plus. Ils peuvent mordre. Pas question de prendre ce risque. »

Or, pas question de se départir des individus qui ne font plus leur cinéma. « Mes animaux font partie de ma vie. Ils m’ont ouvert tellement de portes au fil des ans. Je serai toujours là pour eux. On vieillit ensemble. C’est tout ce qui compte. »