« Alors que de nombreuses résidences isolées ont eu à se creuser un puits plus profond l’été dernier, la population branchée sur un réseau municipal a moins subi l’épisode de sécheresse. Pourtant, certaines municipalités ont eu à acheter de l’eau en citerne, alors que d’autres ont eu à payer plus cher pour traiter l’eau où la quantité de contaminants se trouvaient plus concentrés par l'absence de dilution », explique la gestionnaire de projets à l’OBV Yamaska, Lou Paris, dans un communiqué de presse.
Dans la région, les enjeux d’approvisionnement en eau de Roxton Pond sont connus depuis longtemps, mais c’était une première pour la petite municipalité de Warden l’été dernier, indique le responsable des communications de l’OBV de la Yamaska, Michel Laliberté.
Les systèmes d’approvisionnement en eau de ces secteurs reposent sur des sources souterraines, qui peinent à répondre à la demande. Des propriétaires de puits qui habitent notamment à Sutton et Lac-Brome ont aussi manqué d’eau l’année dernière.
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« Il y en a que c’était une première en 30 ou 40 ans », note Michel Laliberté, précisant qu’il y a un lien avec les changements climatiques et la fréquence des précipitations.
« Il y a des mois où on n’aura presque pas d’eau, mais quand il va pleuvoir ça va être des vraies averses. Donc nos systèmes d’égouts et pluviaux ne sont pas adaptés », citant les prévision de l’organisme environnemental Ouranos pour la région.
En effet, les périodes d’étiages (lorsque le débit des rivières est à son plus bas) seront de plus en plus importantes pour la région. « On s’aperçoit que ça a un impact sur la recharge de la nappe phréatique. Les conséquences des changements climatiques, on les vit aujourd'hui », dit-il.
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« Tout le monde gagne à participer au Mini-forum. Les citoyens vont être informés par les présentations de l'avant-midi. Les ateliers de l’après-midi permettront aux participants de discuter des projets en place pour atténuer les impacts des changements climatiques sur l’approvisionnement en eau, mais également de réfléchir à des nouveaux projets qui pourraient être lancés. Les gens vont repartir avec de l'espoir en sachant qu'il y a des projets en cours, et avec de potentiels projets en tête à mettre en place », poursuit Mme Paris.
Les conférences du matin donneront la parole à Jean-François Bissonnette (Université Laval), à Alex Martin (directeur général de l’OBV de la Yamaska) et à Debra Hausladen (Université de Sherbrooke).
«Les puits sont rendus très très bas, il faut que je les checke aux deux-trois heures, ça me stresse», explique M. Breton, qui en est responsable depuis leur mise en fonction en 2006. Soulignons qu’à cette époque, les puits étaient censés fournir 1000 m3 d’eau par jour, ce qui n’est pas le cas.
Cette capacité s’est rapidement tarie. Grosso modo, les puits fournissent l’été et l’automne la moitié de ce qui était prévu, soit 500 m3/j. Parallèlement, le confinement et le temps sec des dernières semaines ont fait monter en flèche la consommation d’eau. En remplissant leur piscine et en arrosant leur gazon, les Roxtonais ont fait grimper leur consommation à 900 m3 par jour la fin de semaine dernière. Des pointes à 1000 m3 ont même été observées cette année.
Dimanche dernier, neuf voyages de camions-citernes ont été nécessaires afin de garder à flot le réservoir d’eau potable de la municipalité, dont la capacité est de 800 m3 (ou 800 000 litres). C’est là que les camions-citernes déversent leur chargement.
«La nappe phréatique est fragile», ajoute Pierre Fontaine, maire de la municipalité, qui souhaite pourtant continuer à voir sa ville accueillir de nouveaux résidents.
Ce qui arrive est extrêmement plate. On a 1800 familles qui ont besoin d’eau, qui sont brimées. Nos citoyens se retrouvent pris en otages là-dedans.
La pression sur le réseau est énorme. Richard Breton ne dort plus: «Je leur ai dit [à la municipalité] qu’il fallait faire quelque chose, car je ne mettrai pas ma santé en l’air pour ça.» Il a été entendu. Lundi, Roxton Pond a interdit l’arrosage, et ce, jusqu’à nouvel ordre.
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La solution: quatre puits de plus
Depuis son élection en 2017, Pierre Fontaine est conscient du défi de la pénurie d’eau pour la municipalité. C’est en effet depuis septembre 2017 que les puits de la municipalité ne suffisent plus à fournir toute l’année.
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Le problème n’est pas nouveau. Mais cette année, l’aide extérieure des camions-citernes est arrivée 45 jours plus tôt que d’habitude en raison du temps sec et du confinement. «Richard Breton était en état de panique», se souvient le maire.
Pourtant, la solution est là, tout près. Quatre nouveaux puits, d’une capacité suffisante pour alimenter le réseau, ont été forés et mesurés par la compagnie Laforest Nova Acqua il y a deux ans.
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Trouver ces puits n’a pas été une mince affaire. «Depuis 2014, de mémoire, on a effectué 14 forages pour trouver une source d’eau satisfaisante», se souvient M. Fontaine.
Le maire aimerait pouvoir raccorder ces nouveaux puits au réseau existant cet automne, afin que Roxton Pond redevienne de nouveau autonome en eau potable. Et ce, «pour les 50 prochaines années».
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Refus de la Commission de protection du territoire agricole
Les dirigeants municipaux se trouvent toutefois pris aujourd’hui dans les méandres de la Commission de protection du territoire agricole (CPTAQ). Obtenir son autorisation est un préalable incontournable au raccordement des puits. En effet, les quatre puits se trouvent sur un terrain (partie du lot 3 721 987) zoné vert — ou «agricole» —, dont l’usage est protégé par la CPTAQ.
Avant d’obtenir l’appui de la MRC de la Haute-Yamaska en décembre 2018, Roxton Pond a mandaté l’arpenteur-géomètre Daniel Touchette afin de déposer une demande à la CPTAQ d’autoriser l’usage du terrain «à des fins non agricoles».
Réponse de la CPTAQ : c’est non. Le tribunal administratif a fermé le dossier, refusant de l’analyser en profondeur, selon sa décision datée du 24 mars dernier. Motif: le terrain convoité par la municipalité jouxte les terrains constructibles, zonés «blanc».
Même la présence d’une parcelle d’un autre terrain agricole, sorte de zone tampon d’une cinquantaine de mètres séparant le terrain acquis par la Ville (où se trouvent les puits) des terrains résidentiels situés le long de la route 139, n’a pas suffi à convaincre la CPTAQ de l’usage non agricole visé par la municipalité pour son terrain.
Ça fait six ans qu’on cherche de l’eau et ça fait deux ans qu’on vit d’espoir avec les puits qu’on a trouvés. Avec le manque d’eau qu’on vit, j’espère qu’il y en a à la CPTAQ qui dorment mal.
Le maire n’en revient pas
Le maire Pierre Fontaine n’en revient toujours pas.
«On a fait nos devoirs, mais on s’est fait barrer, insiste le maire. Quand tu vois à la CPTAQ un dossier de cette ampleur-là, d’une municipalité qui a besoin d’eau, un dossier qui n’est pas nouveau, et que tu fermes le dossier [sans l’analyser], il me semble que la personne responsable aurait dû prendre le temps de nous appeler pour demander des précisions : “M. Fontaine, pourriez-vous modifier votre demande, car on croit que vous voulez extensionner votre zone blanche, est-ce que c’est le cas ?” On lui aurait dit tout simplement non, et on lui aurait envoyé un autre [numéro de lot] s’il avait fallu.»
Le maire se défend de vouloir prolonger la zone blanche (résidentielle). Il souhaite simplement obtenir le droit de raccorder les puits au réseau existant.
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La municipalité a alors fait appel à l’avocat Yves Boudreault spécialisé en zonage agricole, du cabinet Tremblay Bois, afin de trouver une autre solution. «M. Touchette [...] s’est buté à une prise de décision discutable et restrictive, commente l’avocat. La CPTAQ a considéré qu’une telle demande, en raison de sa localisation et au regard d’une disposition de la loi, devait être obligatoirement assimilée à une demande d’exclusion [de la zone agricole] et non à une demande d’autorisation d’usage à une fin autre, étant donné que le lot sur lequel porte la demande est contigu à la zone blanche.»
L’avocat spécialiste a alors suggéré à la Ville de faire cadastrer la portion de terrain sur laquelle se trouvent les quatre puits— acquise de la Ferme Blanchard inc — afin de persuader la Commission de protection du territoire agricole du bien-fondé de leur demande. «Techniquement, cela fera en sorte que le lot sur lequel porte la demande ne sera pas contigu à la zone blanche», explique Me Boudreault.
La CPTAQ a pris acte de cette nouvelle démarche, sans la commenter. M. Touchette devrait être en mesure de redéposer la demande à la CPTAQ dans environ un mois.
Des chances «plus que raisonnables»
Dans le monde municipal, la demande de Roxton Pond semble «très commune», selon Me Boudreault.
«Le fait que des municipalités implantent des infrastructures de ce genre-là en zone agricole, c’est très bien documenté à la Commission, et généralement, quand la démonstration est faite [de l’usage à des fins non agricoles], je ne connais pas de cas où cela a été refusé.»
Par conséquent, selon l’avocat, les chances que le dossier modifié aboutisse sont «plus que raisonnables», d’autant plus qu’il s’agit «d’un dossier d’intérêt public qui est urgent».
Effectivement, le temps presse, et le maire de Roxton Pond s’impatiente.
Après la CPTAQ, il faut ensuite obtenir les certificats d’autorisation du ministère de l’Environnement, puis aller en appel d’offres. «Si on avait eu une réponse positive de la CPTAQ [ce printemps], on aurait pu faire les travaux cet automne et être prêts pour 2021», imagine M. Fontaine. Désormais, rien n’est moins sûr...
«Ce qui arrive est extrêmement plate et je veux que les gens sachent que ce n’est pas de ma faute si on manque d’eau, précise le premier magistrat de la Ville. On a 1800 familles qui ont besoin d’eau, qui sont brimées. Nos citoyens se retrouvent pris en otages là-dedans.»
En attendant, le responsable du réseau d’aqueduc Richard Breton en a gros sur le cœur. «Ça fait six ans qu’on cherche de l’eau et ça fait deux ans qu’on vit d’espoir avec les puits qu’on a trouvés, raconte-t-il. Avec le manque d’eau qu’on vit, j’espère qu’il y en a à la CPTAQ qui dorment mal.»
« On n’a pas le choix, il faut s’adapter. Il faut gérer l’eau puisqu’elle nous tombe sur la tête », lance Simon Lajeunesse, coordonnateur de celle qui tombe dans Brome-Missisquoi, la MRC chapeautant l’expérimentation d’infrastructures vertes.
Le projet vise à garnir le coffre à outils des municipalités de solutions vertes et peu couteuses. Les succès de cette initiative seront ensuite partagés avec les autres villes aux prises avec des difficultés similaires. Les résultats seront diffusés dans un rapport en 2023.
Gouttières
La MRC a ciblé la municipalité de Bedford pour ses expérimentations en milieu urbain, puisque les surverses d’eaux usées dans la rivière aux Brochets ne sont pas rares lorsque de fortes pluies saturent le système de canalisations. Rénover l’ensemble d’un système est trop coûteux pour une petite ville (2600 habitants), faisant de la gestion des eaux pluviales à la source une avenue de choix.
L’idée est donc que l’eau soit dirigée vers des espaces verts qui vont en absorber un maximum, et éviter ainsi qu’elle circule sur une surface imperméable jusque dans les égouts. Pour ce faire, un règlement a été adopté pour inciter les propriétaires de maison à diriger l’écoulement des gouttières vers la pelouse plutôt que vers le drain et on a aménagé des cellules de biorétention, des espaces végétalisés, en bordure des puisards et à certains endroits stratégiques dans les rues Moreau et Massicotte, identifiées comme vulnérables. Les travaux se mettront en branle ce printemps.
Chenal à deux niveaux
Pendant le XXe siècle, les cours d’eau en méandres ont été linéarisés pour assurer l’efficacité de l’écoulement des eaux et éviter les inondations. Le système fonctionne cependant trop bien et les hauts débits en période de fortes crues accentuent l’érosion des berges et les risques d’inondations en aval du cours d’eau.
La MRC expérimente l’aménagement d’un chenal à deux niveaux, un concept qui vient du Midwest américain et qui permet au cours d’eau de s’adapter à l’intensité des crues. L’eau est concentrée dans le chenal principal, mais peut déborder dans une plaine végétalisée en période de fortes crues. Les plantes et arbustes qui composent le deuxième niveau filtrent et ralentissent l’eau, permettant de diminuer l’érosion de berges, de favoriser la biodiversité des habitats aquatiques et d’améliorer la qualité de l’eau.
Un tel aménagement a fait son apparition en Montérégie en 2013, dans le ruisseau Campbell (Sabrevois), au sud de Saint-Jean-sur-Richelieu, alors une première au Québec. Les travaux sont complétés dans le du ruisseau Walbridge (Bedford), tandis que les plans sont prêts pour les projets dans le ruisseau Morpions (Notre-Dame-de-Stanbridge) et Castor (Stanbridge-Station).
Trappes à sédiments
Le lac Davignon permet d’approvisionner la ville de Cowansville en eau potable, mais une quantité importante de sédiments s’y est accumulée ces dernières années.
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Plus de 150 « trappes à sédiments » ont donc été installées à différents endroits stratégiques dans les fossés de chemin du bassin versant, où transite plus de la moitié de l’eau.
L’eau est filtrée et ralentie dans ces « trappes » pour éviter qu’elle gagne trop de vitesse et érode davantage les sols, mais aussi grâce à des seuils et à l'enrochement des fossés trop abrupts pour limiter l'érosion à la source.
Aide financière et partenaires locaux
« En environnement, il n’y a pas beaucoup d’argent, donc on ne veut pas dédoubler les actions. Il faut être efficace, les partenariats sont donc importants. C’est une des forces du projet », plaide Simon Lajeunesse.
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Le projet est soutenu financièrement par le programme Climat municipalité du ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC) à la hauteur de 703 000 $, soit environ la moitié de la facture totale du projet de 1,5 M$.
La MRC investit 165 000 $ dans le projet, tandis que les municipalités de Bedford, Brome, Bolton-Ouest, Cowansville, Dunham, Lac-Brome et Sutton fournissent des fonds selon l’ampleur des travaux réalisés.
L’OBVBM a financé le projet en milieu agricole et urbain à la hauteur de 30 000 $.
Les organismes de bassin versant de la baie Missisquoi et de la Yamaska, le regroupement des organismes de bassin versant du Québec (ROBVQ), le Réseau-Environnement et l’institut de recherche et développement en développement et en agroenvironnement (IRDA) de l’Université Concordia sont aussi impliqués dans le projet.