La réponse à ce mystère qui revient nous hanter chaque hiver est malheureusement encore bien difficile à obtenir. Les facteurs qui déterminent notre tolérance au froid n’ont toujours pas été démontrés hors de tout doute, pas même pour le professeur adjoint à l’Université de Sherbrooke et chercheur sur la réponse physiologique dans le froid, Denis P. Blondin.
«Ça fait très longtemps que l’on étudie les effets du froid, surtout dans le contexte d’opérations militaires. Les Forces canadiennes s’y sont intéressées beaucoup dans le cadre des effets du froid sur les performances. Mais malgré toute la recherche qui a été faite, on ne sait toujours pas pourquoi certaines personnes sont plus ou moins sensibles au froid», explique M. Blondin.
Le chercheur admet cependant que certains facteurs pourraient offrir une partie de la réponse, sans pour autant en donner la certitude.
« On perd un peu de notre capacité à préserver la chaleur avec l’âge, ce qui fait en sorte qu’on perd plus de chaleur dans l’environnement. Il n’y a pas eu beaucoup de recherche sur l’effet de l’âge et les réponses et les sensations dans le froid, mais c’est sûr qu’il y a certaines réponses physiologiques qui sont atténuées avec l’âge.»
La morphologie de certains peuples pourrait aussi nous renseigner sur leur capacité à tolérer le froid. «Le rapport entre la masse et la surface exposée, ça joue un rôle sur la façon dont le corps peut perdre de la chaleur dans l’environnement. Si tu perds plus de chaleur, tu auras plus froid», indique le chercheur.
Dans les pays plus nordiques, par exemple, le corps serait traditionnellement plus court, permettant d’être moins exposé à l’environnement et donc de mieux conserver la chaleur. C’est plutôt le contraire qui serait observé dans les Tropiques: les corps seraient plus élancés, dans le but de plus facilement évacuer la chaleur.
Le mythe de la femme qui aurait froid plus facilement que l’homme est toutefois à oublier. Aucune donnée récoltée ne viendrait confirmer cette hypothèse pour l’instant. Certaines informations tendent même à vouloir démontrer le contraire.
«Ce que nous avons observé en laboratoire, c’est que les hommes et les femmes répondent pas mal de la même façon au froid. C’est à dire que les femmes n’étaient pas plus sensibles au froid pour une même exposition. Ce qu’on observe aussi, c’est que les femmes sont mieux protégées que les hommes. Elles frissonnent un peu moins. On dirait même qu’elles sont mieux adaptées pour le froid que les hommes. Mais dans la vie de tous les jours, quand on parle des femmes qui semblent avoir plus froid, c’est relié à la sensation, non à la réponse physiologique», précise le professeur adjoint.
Et qu’en est-il de cette autre question populaire, à savoir si le pire que l’on puisse endurer est une canicule ou un froid polaire? Encore là, difficile de prouver quoi que ce soit. Mais certains indices laissent présager à Denis P. Blondin que la chaleur serait moins bien accueillie, et générerait davantage de comportements agressifs.
«Nous avons eu des études dans la chaleur où les gens sacraient, ils étaient vraiment tannés, alors que je n’ai jamais vu ça dans le froid, même dans l’extrême. Je crois que les gens frissonnent trop alors ils n’ont pas la puissance pour faire sortir des mots. Généralement, même si les gens disent qu’ils préfèrent la chaleur, je pense qu’en réalité ils préfèrent le froid.»