Chronique|

Douze résolutions douces

<em>La Danse de la vie</em>, Edvard Munch, 1899-1900

CHRONIQUE / En cette nouvelle année, en ces douze nouveaux mois purs et blancs devant nous, je vous propose douze résolutions à intégrer au quotidien. À ma manière ; à la doux.


1. D’abord, débranche-toi. Après la lecture de cette chronique, ferme tout, ferme les yeux, et ouvre le reste. Reconnecte avec tes sens, et surtout, respire. Tu existes. La véritable connexion ne prend pas de Wi-Fi. Accepte profondément que tes cinq boîtes de réception ne seront jamais vides.

2. Ne tente pas de tout comprendre. C’est impossible. Essaie d’apprendre, le plus possible. Surtout, apprends et comprends-toi. Rien d’autre n’a d’importance. Le « je » touche à l’universel. Cherche-toi, travaille-toi, repentis-toi. Toute la vie.



3. Refuse la culpabilité féminine. Tu peux dire non ; tu peux « déranger » — être là. Tu es assez, et merveilleuse. Ne te sens pas mal d’être en haut, ne te sens pas coupable d’être fatiguée et humaine. Ne te laisse pas insulter, rabaisser, regarder irrespectueusement. Porte ce que tu veux.

4. Puis, danse. Tous les jours, quelques pas, partout. Célèbre ta liberté de mouvement. Aime avec tes jambes, ton torse, tes orteils et tes doigts. Prends l’espace qui te revient sur Terre, dans cette rue. Transforme les attentes de bus et d’avion en spectacle, en monologue du corps. Fais fi des regards : ils disparaîtront. Seul comptent tes pas de tango, de valse et de bachata.

5. Rappelle-toi du ciel. Une fois par jour, lève les yeux pour te remémorer l’infiniment grand. Et l’humilité. Tu es un petit point — certes important. Les nuages sont rois et lents. Imite-les : ralentis. Moule ton organisme à leur nonchalance. « La nature fait les choses sans se presser, et pourtant tout est accompli. » (Lao-Tseu)

6. Aime maintenant. N’attends pas le bon moment, les bonnes formules. Écris à ton « kick », sors le beurre d’arachide, ouvre ton livre. Sans peur, jette-toi.



7. Ne te compare pas. La beauté réside en la singularité : petits grains de peau, longueur de cou, rides d’yeux. Ne compare pas les réseaux sociaux au monde. Ni le virtuel au tangible. Remplis ton propre livre, peins ta propre couleur. Garde les comparaisons pour la poésie.

8. Partout, pour tous et pour toi-même, la bienveillance. Cultive-la en un grand jardin. Baigne-toi dedans. La bienveillance est la meilleure réponse à la méchanceté. Chaque poison lancé se retourne inévitablement vers la bouche qui l’a lancée. Choisis ta réaction, et prends soin de toi.

9. Dompte ton désir de matériels. Prends conscience de ta consommation, et l’utilité de chaque objet acheté. En vouloir plus crée un manque, un trou, un abysse. Installé au fond, comme une présence sombre. En vouloir moins donne la place au plus important. Tu es complet, là maintenant. Sonde tes véritables désirs et le bien-être qu’ils te procurent.

10. Aussi, pleure. Homme, femme, trans, non-binaire, pleure. Nous avons tous les mêmes glandes lacrymales. Vis tes émotions sans honte. Pleure au centre d’achat si tu es triste, au cinéma si un ami aborde un sujet difficile, au bureau si ta tante est malade. Pleure quand tu veux. Sois vulnérable. C’est beau.

11. Soigne-toi. Aussi bien mentalement que physiquement — un n’est pas supérieur à l’autre. Si tu as besoin de Tylenol, de temps, de plantes, de pansements, de solitude, prends-les pour toi.

12. Laisse venir en toi le ravissement. Laisse-toi envahir par l’étonnement envers toute chose. Une fleur qui pousse, un bébé qui rit, un arbre immobile, un appel inattendu. Aie conscience de l’ivresse de vivre.