Ces voix arguent qu’à partir du moment où on ouvre les portes des écoles et des commerces, il n’y a pas de raison pour que les musées, généralement dotés d’espaces spacieux, ne commencent à accueillir le public.
Le 8 mai dernier, le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale, Jean Boulet, a d’ailleurs laissé entrevoir une annonce incessante liée à la réouverture des certains secteurs, dont les musées (ainsi que les salons de coiffure et les cabinets dentaires).
La Journée internationale des musées est célébrée chaque année, le 18 mai.
Le directeur général de la Société des musées du Québec (SMQ), Stéphane Chagnon, reconnaît que les musées, grâce à la « configuration particulière » de leurs espaces, sont bien placés pour devenir les fers de lance du déconfinement du secteur culturel, mais il ne faut pas que le gouvernement aille trop vite, estime-t-il.
« Nous, on milite pour une réouverture sécuritaire : pas d’activités de groupes, ou alors très limitées, ni de visites guidées. C’est de la gestion de risques. »
Bien qu’il dépende du palier de gouvernement fédéral, le Musée canadien de l’histoire, à Gatineau, est membre de la SMQ, tout comme le sont les espaces d’expositions gérés par la Ville de Gatineau (Galerie Montcalm ; Art-Image et Espace Odyssée).
Une poignée d’autres institutions muséales basées en Outaouais sont aussi membres de cette association professionnelle : la Galerie UQO, L’Imagier, le Musée de l’Auberge Symmes, le Manoir-Papineau et le Musée des pionniers de Saint-André-Avellin.
Le directeur général de la SMQ s’attend à ce que les musées soient en mesure d’ouvrir leurs portes pour la période estivale. « Si une quincaillerie ou un commerce de détail peut ouvrir maintenant, il n’y a pas de raison qu’un musée ne [puisse] pas ouvrir à temps pour recevoir des visiteurs cet été. »
En revanche, il doute fort qu’on puisse accélérer le processus et viser une saison printanière.
« Pour les arts vivants », la règle des deux mètres de distanciation « n’est pas facile à gérer, et ce sont des pertes immenses », convient-il. Le SMQ estime effectivement que, « de par la nature de leurs espaces, les musées pouvaient être parmi les premiers du secteur culturel à être décloisonnés. »
Dans la mesure où « 75 % des entrées sont des visites individuelles », la réouverture des musées ne devrait pas poser de problème majeur, dit-il. Il s’attend par contre à ce que les visites de groupe (qui représentent le quart restant) soient « très affectées ».
« On va pouvoir visiter en famille, pour ça, il n’y a pas de souci. Mais les groupes, ça va être assez difficile. C’est plus complexe à gérer. On attend les consignes des ministères. »
![« Si une quincaillerie ou un commerce de détail peut ouvrir maintenant, il n’y a pas de raison qu’un musée ne [puisse] pas ouvrir à temps pour recevoir des visiteurs cet été », estime le directeur général de la Société des musées du Québec, Stéphane Chagnon.](https://lescoopsdelinformation-la-voix-de-lest-prod.web.arc-cdn.net/resizer/SRrmY3If-N5981tCdWOC49f1Cgk=/1440x0/filters:format(jpg):quality(95)/cloudfront-us-east-1.images.arcpublishing.com/lescoopsdelinformation/D3KDLCZEIZF6NJX7TRGR2SII2Q.jpg)
Plan de déconfinement
Son organisme, qui regroupe environ 280 institutions muséales (musées, centres d’interprétation et centres d’exposition) sur les quelque 400 que compte le Québec, « travaille activement, depuis des semaines » sur un plan de déconfinement.
Ce plan, élaboré en concertation avec des représentants des ministères du Travail, du Tourisme et de la Culture, n’a toutefois pas encore été « validé par Québec », confiait-il, cette semaine. La décision d’ouvrir ou non ses espaces — qu’il s’agisse d’exposition ou de salles louées à des tiers — reviendra à chaque musée, au moment jugé opportun par les gestionnaires, car ce sont eux qui « connaissent leurs espaces et savent comment poursuivre l’expérience individuelle tout en respectant les mesures sanitaires », rappelle Stéphane Chagnon.
Car il ne suffit pas d’obtenir les autorisations en matière de santé publique, rappelle-t-il. Le nœud du problème réside justement dans « la mise en place d’un plan sanitaire », avant toute autre considération, avertit-il.
D’abord, réembaucher du personnel
Il estime que la réouverture — sanitairement responsable — des institutions muséales permettra d’offrir une « expérience améliorée » aux futurs visiteurs, contraints de s’éparpiller. Mais il ne faut pas négliger l’importance des délais liés à « la première phase du plan », prévient-il.
Cette première étape est purement administrative : à partir du moment où les musées obtiendront « des consignes claires » et le feu vert des autorités, les musées auront besoin d’une période de « 3 à 4 semaines » pour se préparer à l’accueil du public. Il faudra procéder à des « embauches et à la formation du personnel » qui sera en contact avec le public.
« Et puis, est-ce qu’il y aura assez de Purell pour tout le monde ? Assez de désinfectant et de protecteurs faciaux pour les employés qui seront à proximité du public ? »
« C’est pour ça que la première phase (l’embauche) est importante », insiste-t-il, avant d’évoquer la deuxième phase, qui consistera à « créer des parcours sécurisés ».
Les musées ne pourront pas tous s’adapter facilement, pressent M. Chagnon. Il faudra tenir compte de tous les éléments tactiles, « toutes les bornes, les dispositifs interactifs des musées de science et de technologie, qui sont vecteurs de propagation. »
Renseignements : CMQ ; https://www.musees.qc.ca/fr/musees
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UNE APPROCHE COORDONNÉE DANS LES MUSÉES «FAMILIAUX»
Au Musée canadien de la Nature (MCN), un comité composé de membres de la haute gestion s’affaire à trouver des solutions pour pouvoir proposer à son public « une expérience saine et agréable » dès que le musée pourra ouvrir ces portes.
Les décisions que ce comité prendra dépendront aussi grandement d’un sondage mené « auprès du public, nos membres et les gens qui sont sur nos listing de courriels », explique la Vice-Présidente d’Expérience et d’Engagement du MCN, Ailsa Barry.
Avant de décréter quelles mesures transitoires pourraient être entreprises advenant un déconfinement des lieux, « on veut savoir précisément quels sont les enjeux-clefs, les choses auxquelles les gens s’attendent de notre part, ce qui est le plus important à leurs yeux », explique-t-elle.
C’est comme cela que le MCN aura une meilleure idée des orientations à prendre et des priorités à établir, estime la gestionnaire. Elle avoue qu’il demeure toutefois bien difficile, à l’heure actuelle, de savoir concrètement à quelle fréquence il faudra nettoyer les bornes tactiles interactives et les toilettes, ou même comment revoir le design des parcours tant qu’on ne connaît pas précisément quelle seront les règles de distanciation à respecter au moment où les autorités auront validé la réouverture des musées. Le MCN, souligne Ailsa Barry, a également entrepris des discussions avec de nombreux musées nationaux du Canada — « et en particulier Ingénium, parce qu’on a des réalités similaires et le même public familial » — afin de pouvoir prendre des décisions « concertées ». Et donc de « proposer le même genre de choses ».
« On cherche à identifier ensemble quelles seraient les meilleures pratiques », dit-elle.
Ingenium – Musées des sciences et de l’innovation du Canada est l’entité qui fédère les trois grands musées nationaux consacrés aux sciences : le Musée de l’agriculture et de l’alimentation du Canada, le Musée de l’aviation et de l’espace du Canada et le Musée des sciences et de la technologie du Canada, tous trois basés à Ottawa.
Il est toutefois peu probable qu’on rouvre la salle de cinéma du MCN ou qu’on réactive les activités connexes (les nuits au musée, etc.), dit Mme Barry, en ajoutant que les services de restauration seront vraisemblablement limités, dans l’offre muséale de fin de pandémie.
« Aller au musée n’est pas un besoin essentiel, rappelle la vice-présidente du MCN : c’est pour le plaisir et la détente, qu’on y va. Notre rôle, c’est de nous assurer que la visite reste agréable », en dépit des contraintes sanitaires supplémentaires qui s’imposeront. « Le véritable test, c’est le plaisir. » Ce qui ne sera pas le cas si les visiteurs ne se sentent pas en sécurité, note-t-elle.
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LE MUSÉE CANADIEN DE L'HISTOIRE AVARE DE DÉTAILS
Au Musée canadien de l’histoire (MCH) et au Musée canadien de la guerre (MCG), les deux grands musées fédéraux de la région d’Ottawa-Gatineau, la stratégie de communication est la même que du côté des musées nationaux: pas question de s’avancer sur une date de réouverture. Ces deux musées fédéraux restent donc fermés «jusqu’à nouvel ordre» en raison de la COVID-19, la priorité étant là aussi de garantir «la santé et la sécurité de nos employés et des visiteurs». La directrice des Affaires de la société d’État qui les gère, Patricia Lynch, s’en tient à ce discours.
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En date du 14 mai, il n’était pas possible de savoir quels exemples concrets de «mesures transitoires» ces deux musées envisageaient, lorsque leur déconfinement sera mis en place, dans un contexte de mesures sanitaires et de distanciation sociale imposées.
En marge des visites des expositions, pourra-t-on recommencer à louer des espaces ? Profiter de services de restauration ? La salle de cinéma IMAX et le Théâtre du MCH pourraient-ils à nouveau accueillir le public ?
Suivre les directives
«Un plan» fait présentement l’objet de «discussions à l’interne», mais la gestionnaire reste évasive quant à ses détails. « Nous examinons actuellement divers scénarios ainsi que les mesures qui pourraient être mises en place pour assurer la sûreté et la sécurité de nos employés et du public lors de notre réouverture, et comment ceux-ci seront appliqués aux divers aspects de nos opérations notamment les expositions, les programmes, les événements, les services alimentaires, etc.»
«Le MCH suit les lignes directrices et les directives émises par l’Agence de la santé publique du Canada», se borne à dire Mme Lynch. D’ici l’annonce d’une réouverture, «nous sommes heureux d’offrir le portail Musée à la maison qui donne accès à du contenu numérique attrayant comme des expositions virtuelles, des collections en ligne, des ressources pédagogiques, des bricolages et d’autres ressources pour les visiteurs de tous âges», ajoute-t-elle.