Survivre au télétravail (avec les enfants)

Si vous partagez la maison avec les enfants, soyez conscients que vous ne pouvez pas les faire disparaître pour travailler comme si rien n’était. Sur la photo, Karl Emmanuel Picard et Billy Picard.

Depuis la semaine dernière, c’est l’émoi dans les milieux de travail et dans presque toutes les industries touchées par la mise en quarantaine d’employés, la menace d’une fermeture ou d’une annulation importante.  Lundi matin, de nombreux employés, encouragés à l’éloignement social volontaire, seront en télétravail. Ou - le comble -  en télétravail avec enfants. Comment s’acquitter de cette double tâche sans perdre la tête?


Adepte du télétravail depuis de nombreuses années, à titre de travailleuse autonome, d’employée et de gestionnaire, j’ai appris à travailler avec mes enfants de 3 et 6 ans autour, comme l’été dernier et tout récemment lors de la semaine de relâche. Voici quelques trucs pour que vous puissiez y trouver vos aises, éviter les pièges et, qui sait, peut-être en faire une nouvelle pratique courante.

1. Accepter de s’accorder un temps d’adaptation 

Il y a fort à parier que les premières heures ne seront pas des plus productives, entre les pépins techniques, la fébrilité des enfants, les nouvelles en continu et le service de clavardage de l’entreprise qui déborde de blagues et de directives, on se laisse le temps - à soi-même et aux enfants - de trouver ses repères et son « flot »

2. Travailler avec le résultat en tête et non les heures

C’est dans l’ADN des organisations de nous assigner un cubicule et de s’attendre à ce qu’on y soit assis toute la journée. Or, en télétravail, c’est inutile et avec les enfants autour, c’est impensable. C’est donc l’occasion pour l’employeur comme pour l’employé d’expérimenter la gestion par les résultats et les horaires flexibles.

Pour instaurer un climat de confiance favorable au télétravail, employeur et employé doivent s’entendre sur une mission claire et importante et sur des livrables réalistes. Il ne suffit pas de travailler pendant un nombre d’heures donné, mais bien d’accomplir le travail stratégique nécessaire à l’avancement ou à la continuité souhaitée.

Il importe par exemple de cibler les projets prioritaires et pourquoi il l’est, en toute transparence. Par exemple, on dira : « Il est important que le projet A prenne le moins de retard possible parce que l’entreprise ne peut se permettre d’être payée plus tard. » 

Quand c’est possible, on tentera de quantifier la productivité autrement qu’en heures. Par exemple, au lieu de dire que la priorité, c’est de continuer à clients, on dira que les clients qui écrivent doivent recevoir une réponse dans la même journée, parce que c’est la réputation de l’entreprise qui en dépend. 

Quand tous les membres de l’équipe comprennent leur mission individuelle et commune, on a une situation propice à l’engagement. Tous arrivent donc mieux à organiser leur temps et à retrouver un certain sentiment d’efficacité personnelle et collective, d’équilibre et de satisfaction.

C’est ainsi qu’on vaincra le plus grand désavantage du télétravail : la perception qu’on y travaille moins ou moins bien.

3. Maintenir son lien à l’équipe et communiquer efficacement

 Tenu loin de la gang du bureau, on peut craindre de se sentir isolé et être tenté de se brancher sur le canal divers du clavardage d’entreprise toute la journée. Or, une fois les priorités claires, c’est plus facile d’organiser nos communications efficacement.

LE CLAVARDAGE: Qui pense télétravail pense devoir d’être toujours en ligne, prêt à répondre ou à participer au clavardage. Il n’y a pourtant rien de plus anxiogène et contre-productif. Restez donc loin du clavardage de l’entreprise et des médias sociaux lors de vos blocs de « travail concentré ». Accordez-vous plutôt quelques pauses sociales de 15 minutes, 2 à 4 fois par jour. Et ce, même si vous gérez une équipe. Invitez toutefois les gens à vous rejoindre directement, par téléphone ou par message texte s’ils ont une question urgente. Vous recevrez donc une notification directement, même quand vous serez avec les enfants.

HONOREZ VOS APPELS: Pour les échanges autour des projets ou des livrables prioritaires, minimisez également le clavardage et les courriels informels. Attrapez le téléphone et maintenez les rencontres statutaires prévues. Osez même les faire en vidéo-conférence. Non seulement la communication est-elle plus efficace de vive voix, mais il y aura quelque chose de chaleureux et de convivial à vos échanges en face à face à partir de vos environnements respectifs. 

PRENEZ DES PAUSES DE L'ORDINATEUR: Certains trouvent leur compte plus que d’autres sur le web social, mais après une journée de travail à l’ordinateur, promettez-vous de laisser vos outils derrière pour reconnecter au monde analogique, aux membres de votre famille et à votre environnement. Sortez prendre une marche, cuisinez des biscuits ou jouez au ballon avec les enfants. Sans déplacements, il devrait vous rester au moins un peu d’espace et de temps pour tout ça! 

4. Instaurer un rythme travail / famille

Et les enfants dans tout ça? Le rythme, c’est en quelque sorte la nouvelle routine, que tous devront expérimenter et s’approprier. Qui dit rythme, dit fluide : pas besoin de tout prévoir au quart de tour, mais il doit être prévisible pour que les enfants sachent ce qui les attend.

Par exemple, on instaure un moment fixe pour les collations, les repas et les écrans, puis on identifie les plages horaires où on sera 100% disponibles pour jouer ou discuter avec eux, comme par exemple en début, milieu et fin de journée. Des balises utiles pour eux comme pour nous, qui pourrions facilement être aspirés par le vortex de notre ordinateur ou de notre routine de travail habituelle.

5. Ne pas chasser les enfants 

Tant mieux si un autre adulte est à la maison ou si vous décidez de vous relayer avec des amis ou un voisin. Toutefois, si vous partagez la maison avec les enfants, soyez conscients que vous ne pouvez pas les faire disparaître pour travailler comme si rien n’était.

La source des conflits et du stress réside dans le besoin de contrôler la situation. Acceptez que ce sera différent et imparfait, instaurez des règles, mais préparez-vous à les répéter et à les expliquer souvent, c’est nouveau tout ça!

Côté espace de travail, installez-vous à proximité raisonnable de leur aire de jeux pour qu’ils vous sachent présent pour eux et informez-les des règles, comme la possibilité de s’asseoir près de vous pour des jeux calmes et autonomes ou la nécessité de mettre la main sur votre bras pour vous parler lorsque vous êtes au téléphone. 

Enfin, pour éviter votre propre frustration, prévoyez des blocs de travail de 1 à 2 heures maximum, selon l’âge des enfants, avant de prendre une pause au cours de laquelle vous pourrez interagir avec eux ou observer leurs activités.

Faites le compte et si - à travers les demandes, la résolution des prises de bec et l’installation du matériel de bricolage - vous arrivez à travailler 5 ou 6 heures, ce sera une très bonne journée.

 Prenez le tout avec un grain de sel, limiter la pression est la clé.
Profitez-en pour être ensemble, tout simplement. 

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HORAIRE TYPE DE TÉLÉTRAVAIL AVEC LES ENFANTS

  • 7h30-8h : jeu avec les enfants
  • 8h-10h : web social et travail bloc 1 (2h)
  • 10h : pause collation / enfants
  • 10h30 - 11h30 : travail bloc 2 (1h)
  • 11h30 -13h : pause famille/dîner
  • 13h-15h : travail bloc 3 (2h)
  • 15h-16h : dehors avec les enfants
  • 16h-16h30 : web social et courriels (30 min)
  •  20h-21h : travail bloc 3 (1h ou plus au besoin)