« On manque de bras. On ne sait plus où donner de la tête pour joindre les deux bouts. Les résidents ne reçoivent pas tous les soins qu’ils devraient. Et là, on a une fille qui fait le travail et qui veut continuer à être préposée. Mais on lui dit qu’à cause du papier [cours], on ne peut pas lui donner de poste. C’est complètement absurde », a déploré une collègue, qui a requis l’anonymat par peur de représailles de l’employeur.
Une infirmière, qui travaille également au centre d’hébergement Villa-Bonheur, abonde dans le même sens.
« Le CIUSSS a un double discours. D’un côté, on nous dit qu’on fait tout pour recruter du personnel, alors que de l’autre, on met des bâtons dans les roues à ceux qui veulent travailler. Est-ce qu’on va attendre que la préposée parte au privé avant de s’ouvrir les yeux ? On en a déjà assez de ramer pour trois, a-t-elle clamé. Un peu de jugeote de l’employeur, ça ne ferait pas de tort. »
Qualifications
Selon nos informations, corroborées par plusieurs sources, la jeune femme en question a commencé à travailler comme préposée aux bénéficiaires de soir durant ses études en soins infirmiers. Il s’agit d’une mesure préconisée par le CIUSSS pour contrer la pénurie de main-d’œuvre. Après environ un an, elle a décidé de quitter les bancs d’école et de garder son emploi comme PAB.
Elle a donc soumis sa candidature pour le poste vacant qu’elle occupe depuis des mois. Son dossier n’a toutefois pas été retenu. Elle aurait alors cru qu’un membre du personnel ayant plus d’ancienneté l’avait obtenu. Or, le poste a été réaffiché peu de temps après. La jeune préposée a postulé à nouveau, en vain. L’employeur lui aurait indiqué qu’elle n’a pas les qualifications requises pour ce poste, car elle n’a pas complété le cours de PAB de plusieurs centaines d’heures.
Plainte
Une autre personne a finalement eu le poste de préposé que la jeune femme convoitait. Devant l’impasse, elle a déposé une plainte auprès de l’employeur, via le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP).
Appelé à commenter, le syndicat a joué de prudence. « On est au courant de la situation. Comme on a déposé un grief, on ne se prononcera pas publiquement dans le dossier pour le moment », a indiqué le vice-président du SCFP 4475, Steve Brochu.
De son côté, Gaëlle Simon, directrice adjointe au soutien à la gestion intégrée de la main-d’œuvre au CIUSSS de l’Estrie, a aussi réagi de façon succincte disant vouloir attendre les conclusions de l’enquête entreprise à la suite du grief avant de prendre position.
« La situation portée à notre attention est exceptionnelle puisqu’elle se présente rarement comme cas de figure. Elle nous amène cependant à réfléchir sur nos mécanismes internes d’attribution de postes. Si l’analyse et l’enquête à la suite du grief déposé par le syndicat démontrent que nos processus peuvent être améliorés, nous les ajusterons », a-t-elle indiqué par courriel.
« Notre objectif principal demeure d’avoir le personnel requis pour assurer les soins et services, mais également de reconnaître et de valoriser les compétences des étudiants et du personnel qui ont déjà amorcé leurs parcours avec nous », a aussi indiqué Mme Simon.
En Estrie, il manque 600 préposés aux bénéficiaires, a mentionné il y a à peine quelques semaines à La Voix de l’Est un représentant du SCFP. À ce chapitre, rappelons que le CIUSSS tentera de pourvoir 1000 postes dans tous les établissements de son territoire lors du « Grand repêchage », qui se tiendra simultanément à l’Hôtel Castel de Granby et à l’Hôtel Delta de Sherbrooke, le 22 février prochain.