Le juge administratif Jason W. Downey a récemment débouté un employé de Services partagés Canada qui voulait faire reconnaître les impacts de cette impolitesse comme étant une lésion professionnelle.
La Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles reconnaît certains impacts psychologiques comme étant des lésions à part entière.
Mais pas cette fois, a tranché le juge du Tribunal administratif du travail (TAT).
« En 2017, lit-on dans la décision du TAT, le travailleur dépose une réclamation auprès de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) accompagnée d’un diagnostic de trouble de l’adaptation anxieux. »
L’incident au travail s’est produit en 2016.
Une collègue de l’employé en question s’est rendue dans son bureau pour lui rendre compte de ses démarches. « Le travailleur est alors occupé à d’autres tâches et il est un peu brusque avec elle, lui demandant sèchement de revenir plus tard. Celle-ci est contrariée par le comportement du travailleur et lui exclame ‘Go f.. yourself!’ (Va te faire foutre !). »
Cette réplique aurait eu pour effet de le « traumatiser immédiatement ». Son employeur aurait aussi banalisé l’évènement et contribué à sa lésion professionnelle, maintient-il.
Le fonctionnaire s’est décrit lui-même comme étant un expert — depuis plus de 30 ans — en matière de santé et sécurité au travail. Selon lui, cette insulte relève de la violence au travail.
À la suite de cet incident, il s’est prévalu de sa clause sur le refus de travailler, a quitté les lieux, et est revenu dès le lendemain.
Entre temps, la collègue du fonctionnaire a pris un congé puis elle est revenue au travail quelques semaines plus tard, au grand dam du plaignant.
Le fonctionnaire a quitté le bureau pour une deuxième journée en se prévalant de sa clause de refus de travail. Son « agresseur est revenu sans avertissement », a-t-il fait valoir, avant de revenir le lendemain.
Caractère
Le travailleur s’est dit estomaqué lorsque son employeur lui a demandé de puiser dans sa banque de congés personnels pour ses deux refus de travail. « À partir de ce moment, il (dit s’effondrer) au niveau psychologique », relate le juge Downey.
« Des témoins à l’audience expliquent qu’il est un homme avec des traits de personnalités narcissiques, d’ayants droit, qui s’y connaît mieux que quiconque et qui démontre un sentiment de supériorité envers ses collègues. De façon un peu surprenante, le travailleur reconnaît lui-même ces caractéristiques lors de son témoignage, tout en souriant, en précisant que les témoins n’ont probablement pas tort. »
Le juge reconnaît que les paroles de la collègue sont regrettables, mais conclut que le travailleur a alambiqué cette histoire.
« Le prisme par lequel le travailleur perçoit toute cette affaire est unique et composé d’une perspective tendancieuse et pontifiante. Il semble être le seul à détenir la vérité et s’indigne devant toute version différente de celle proposée par autrui. Sa souffrance est nourrie par ces convictions inusitées et invariables. »
Employeur
Le magistrat en est venu à la même conclusion que l’enquête interne voulant que l’employeur eût réglé ce conflit dans les règles de l’art.
« L’employeur prétend que les évènements à l’origine du récit du travailleur sont désolants, mais qu’ils n’atteignent pas le seuil de gravité objective suffisante pour causer une lésion psychologique. (...) Selon l’employeur, le travailleur a intériorisé cette situation et l’a amplifiée de façon démesurée avec le temps. Il s’agit selon lui d’un incident regrettable, mais tout de même banal. »