Punaises de lit non grata

André Plouffe, de la Coop Autonomie Chez-soi, a installé une sécheuse industrielle fonctionnant au propane pour tuer les punaises de lit dans les textiles.

Alors que les punaises de lit donnent des maux de tête aux propriétaires et aux locataires de logements un peu partout en Amérique du Nord, l’Office municipal d’habitation (OMH) de Granby fait figure de village gaulois en résistant à l’envahisseur. La collaboration des locataires, des propriétaires et d’un exterminateur consciencieux semble être la clé du succès pour empêcher une infestation.


La coopérative Autonomie Chez-soi a trouvé une façon originale de s’attaquer à ce problème de taille : installer une sécheuse industrielle dans une remorque pour réagir rapidement aux cas d’infestation du parc immobilier de l’OMH de Granby. Force est de constater que la technique employée depuis six ans a porté fruit puisque seuls trois cas de punaises de lit ont été recensés dans l’une ou l’autre des 364 unités de logement depuis le début de l’année. Six autres avaient été réglés en 2017, rapporte Radio-Canada.

À noter qu’il est impossible d’obtenir des statistiques sur les maisons privées, condos et logements pour l’ensemble de Granby, le signalement de cas de punaises de lit n’étant pas obligatoire dans la région.



Travail d’équipe
« Les premières années, on avait des nouveaux cas tous les mois, indique André Plouffe, directeur de la Coop Autonomie Chez-soi qui offre des services d’aide à domicile. Depuis notre nouvelle façon de faire, ça a chuté énormément. Le processus est bon. À Granby, on est rendus dans une situation où on a le dessus. »

Six ans, la direction de la Santé publique de l’Estrie a contacté l’organisme d’économie sociale pour venir en aide aux personnes à mobilité réduite, non autonomes ou vivant des difficultés financières étant aux prises avec une infestation de punaises de lit. La coopérative avait alors fait preuve d’ingéniosité pour amener les locataires à faire leur part dans le combat contre cette nuisance.

« Les règlements disent que le propriétaire doit faire désinfecter le logement, mais le locataire est responsable de ses affaires, explique M. Plouffe. C’est pourquoi on a fabriqué une remorque avec une grosse sécheuse industrielle qui fonctionne au propane. »

La Coop se déplaçait sur les lieux pour sortir de l’appartement les matières textiles comme les vêtements et la literie, évitant du même coup que les buanderies de la ville ne soient infestées à leur tour. Le temps d’un cycle de 45 minutes à haute chaleur, les insectes étaient tués à coup sûr. Pendant ce temps, l’exterminateur Solution Cimex faisait son travail dans le logement.



Également propriétaire d’immeubles à logements, le propriétaire de Solution Cimex Martin Beaudry s’est spécialisé dans le combat contre la punaise de lit après avoir rencontré des difficultés avec son propre parc immobilier. Il est donc bien placé pour savoir que ces bestioles peuvent faire vivre un véritable cauchemar à leurs hôtes. « Il y a vraiment une détresse en arrière de ça. Il faut prendre le temps de parler aux gens, insiste l’exterminateur. Si on n’explique pas aux gens comment c’est arrivé chez eux, ça va toujours revenir. Ça fait partie de notre mission d’informer les gens. »

Martin Beaudry et son entreprise, Solution Cimex, se spécialisent dans l’éradication des punaises de lit par un traitement thermal.

La coopération des propriétaires est aussi primordiale. À Granby, contrairement à Montréal, ils ne rechignent pas à faire traiter convenablement dès la première déclaration, soutient M. Beaudry. « À Granby, si tu es locataire et que le propriétaire ne traite pas, ça ne sera pas trop long qu’il va recevoir une visite de la Ville », dit-il.

La Ville de Granby n’a pas eu à intervenir souvent pour forcer les propriétaires à faire traiter leurs logements depuis 2011. Tout au plus une vingtaine de lettres ont été acheminées.

Personne n’est à l’abri de ces parasites. Les gens plus fortunés peuvent ramener des punaises de lit de leur voyage, tandis que les personnes qui achètent des vêtements usagés ou qui récupèrent des meubles de seconde main risquent de se retrouver avec une infestation, explique M. Beaudry.

Diminution des cas
Aujourd’hui, les services de la Coop Autonomie Chez-soi ne sont presque plus requis. « Le partenaire de l’organisme, Solution Cimex, a suivi l’évolution technologique et est rendu très bien équipé, poursuit André Plouffe. Depuis un an, on n’intervient plus. Notre partenaire a évolué plus rapidement que nous. »

Solution Cimex possède effectivement plusieurs outils pour éradiquer les punaises de lit, allant du traitement à la vapeur combinée à un insecticide, à la congélation en passant par un traitement thermique dans le logement. Ce dernier consiste à envoyer de la chaleur jusqu’à atteindre un certain degré pour brûler les punaises de lit et les œufs.



« La mentalité de jeter des choses, ça me choquait, raconte-t-il. Je me suis mis à faire des recherches et j’ai vu que le froid fonctionnait. J’ai développé plein de protocoles pour ne pas avoir à dire non à un client. On adapte donc à chaque situation. Des livres, des albums photo et des vêtements plus délicats, par exemple, on va les congeler. À Granby et Sherbrooke on est les seuls à proposer le traitement thermique. On voulait amener cette technologie-là en région. »

Une fois le traitement thermique terminé, un maître-chien vérifie avec ses trois partenaires à quatre pattes qu’il ne reste plus de punaises.

La diminution des appels pour exterminer la punaise de lit se traduit, chez Solution Cimex, par une baisse du chiffre d’affaires, lance sans gêne M. Beaudry. En fait, il en est même fier puisque ça signifie qu’il fait bien son travail, ajoute-t-il.

« Ce n’est pas normal quand le chiffre d’affaires reste le même ou augmente dans une ville. Ça fait drôle à dire, comme entrepreneur », admet l’exterminateur.