« J’adorais faire ce métier-là, je me levais le matin et j’étais contente d’aller travailler. Mais tu restes marqué quand tu as un accident comme celui-là, et c’est très fréquent. Être signaleur, c’est un métier dangereux », a-t-elle raconté après qu’une cérémonie se soit déroulée à la Résidence funéraire Steve Elkas en l’honneur du signaleur sherbrookois Michel Carmel, décédé lorsqu’il s’est fait heurter par une automobiliste à Bonsecours il y a deux semaines.
Les chiffres sont effrayants : 20 signaleurs se feront frapper chaque année au Québec, et dans les sept dernières années, six sont décédés.
Des accidents qui révèlent un problème bien ancré de non-respect du métier de signaleur, avance Mme Lapatrie, qui est porte-parole de ce corps de métier pour l’Association des travailleurs en signalisation routière du Québec.
« C’est inimaginable ce que les signaleurs peuvent vivre sur les chemins. On se fait lancer des injures par la fenêtre, garrocher des cafés dessus, envoyer des doigts d’honneur... »
Des amendes ridicules
Les membres de l’Association, dont le président Jean-François Dionne, espèrent évidemment que le gouvernement appliquera des amendes plus sévères aux conducteurs qui heurtent des signaleurs. « En ce moment, c’est l’équivalent d’un arrêt qui n’est pas fait. On a fait des présentations quand la SAAQ a fait la tournée du Québec pour la consultation publique, et on a déposé un mémoire qui fait un rappel aux commissaires que texter au volant, c’est 4 points d’inaptitude; une manœuvre illégale près d’un autobus scolaire, 9 points; une conduite dangereuse, 12 points, mais frapper un signaleur, c’est 3 points », souligne-t-il. « On peut dire que ç’a été écouté par le ministère des Transports, et on devrait être bien contents. »
M. Dionne croit que les accidents qui surviennent sont évitables à 90 %; il suffit que les conducteurs soient plus prudents.
La cérémonie de samedi a été éprouvante pour la famille du défunt ainsi que pour les travailleurs en signalisation routière qui s’étaient réunis. Des policiers de Sherbrooke ainsi que des compagnies de remorquage se sont également déplacés pour rendre honneur à M. Carmel.
« Quand on vit des émotions comme celles qu’on a vécu [samedi], ça rentre dedans. Les signaleurs, on ne porte pas des habits de clown pour écœurer la population; on travaille, et on est là pour les travailleurs qui ont des chantiers à arranger. Les gens pourraient essayer de se mettre à notre place... s’ils passaient un avant-midi à faire le travail qu’on fait, je suis sûre qu’ils seraient moins impatients », résume Mme Lapatrie.