«C'est effectivement le cas que les Maisons Alouette traversent des temps difficiles. Ce n'est pas ce qu'on a déjà connu et on est venu à la conclusion que nous devions revoir notre modèle d'affaires», a confirmé hier le président, Bradley Berneche.
Les difficultés de l'entreprise sont attribuables à ses exportations, qui sont en constante baisse depuis 2003. «On est en affaires depuis 40 ans et on a toujours exporté des maisons. Tous les ans, c'est en moyenne 30-40% de notre chiffre d'affaires qui est livré à l'extérieur du pays, surtout aux États-Unis et en Angleterre. Depuis 2008, nos exportations ont chuté dramatiquement pour pratiquement disparaître. En 2011, c'est 0%. Il n'y en a eu aucune. Ça fait un bon trou dans notre carnet de commandes», explique M. Berneche.
En plus d'un taux de change défavorable, les Maisons Alouette sont victimes du fait que la construction est au ralenti dans les deux pays qui achetaient auparavant près de la moitié des maisons fabriquées à son usine de Sainte-Anne-de-la-Rochelle. «Aux États-Unis et en Grande-Bretagne, il y a actuellement le tiers des mises en chantier qu'il y avait il y a cinq ans. Si on connaissait ça au Québec, ce serait catastrophique», illustre M. Berneche.
Cette baisse du chiffre d'affaires fait en sorte que la mise à pied des employés saisonniers risque d'être plus longue que d'habitude. Près de 85 personnes travaillaient à l'usine en période de pointe cette année. Ils ne sont plus que 40 à l'approche du temps des Fêtes et ce nombre pourrait encore diminuer. «Il va y avoir des mises à pied comme chaque hiver, mais il se peut qu'il y en ait davantage. Nous avons rencontré les employés il y a deux semaines pour les avertir qu'il y en a pour qui ça va être plus tôt et peut-être plus long», a indiqué hier le président de l'entreprise.
Vaste restructuration
Confronté à une chute importante de ses ventes, le constructeur prévoit également entreprendre une vaste restructuration de ses activités. L'entreprise compte délaisser la vente directe aux particuliers et la production de maisons modulaires avec la formule clé en main pour se concentrer sur la fabrication de maisons en panneaux, surtout vendues aux entrepreneurs et aux autoconstructeurs. Une façon d'économiser sur les frais de publicité et de mise en marché.
«Depuis 2008, on trouve ça difficile et nous avons décidé de faire des changements importants. Nous allons faire moins de modulaires où on doit agir en tant qu'entrepreneur, donc faire les fondations et autres travaux de chantier. C'est ainsi que le site de Saint-Alphonse a été mis en vente. Avec notre nouvelle approche, ça ne nous sert à rien de garder un point de vente sur le bord de l'autoroute», explique M. Berneche.
S'il reconnaît que son équipe risque de rapetisser durant la première année de sa réorganisation, il refuse d'avancer des chiffres, affirmant ignorer à quel rythme reprendra sa production en 2012. «On entreprend tout juste la restructuration. Je ne peux répondre quant à savoir si on aura besoin de 75 ou de 100 personnes l'an prochain. Ça va dépendre de notre carnet de commandes», dit-il.
Bien évidemment, cette réorganisation n'augure rien de bon pour les employés de l'usine de Sainte-Anne-de-la-Rochelle. Ceux rencontrés hier à leur sortie de l'usine ne semblaient toutefois pas inquiets outre mesure. «On nous a annoncé la semaine dernière que la moitié des employés serait coupée vendredi qui vient, et d'autres le vendredi suivant. Ce n'est pas si pire parce que l'année passée, des employés avaient été coupés dès octobre. On va se croiser les doigts pour que ça reparte en force l'an prochain. Sinon on va se trouver autre chose», a laissé tomber une employée, Annick Marois.
«Ça ne m'inquiète pas tant que ça. Ça fait 15 ans que je travaille ici et c'est toujours comme ça chaque hiver. De ce que je comprends, je ne crois pas que l'usine soit en si grande difficulté, mais qu'ils ont l'intention de changer leur façon de faire. On verra les impacts que ça aura», a confié un autre employé, qui a tenu à conserver l'anonymat.
M. Berneche a d'ailleurs tenté de se montrer rassurant en réfutant les rumeurs de fermeture. «L'entreprise ne fermera pas. On ne fera pas faillite. On est capable de payer nos comptes, mais quand une entreprise ne parvient pas à réaliser des profits adéquats, on ne peut pas dire qu'elle est en santé», dit-il rappelant que celle-ci n'en était pas à sa première crise.
«Il nous en est arrivé des choses comme en 1982 où les taux d'intérêt étaient de 22%, ou en 1988 quand nous avons passé au feu. Encore une fois, il s'agira de prendre un petit recul et s'ajuster. On fait un pas en arrière pour mieux aller en avant», conclut-il.