Le Granbyen conteste la facture de près de 2700 $ de l'hôpital de Granby pour défrayer les coûts de l'hospitalisation dans une chambre privée de son épouse Johanne Rodrigue, décédée des suites d'un cancer le 30 juin 2008.
Il a écrit à tous les députés pour les sensibiliser à la question. Dans leurs réponses, des élus l'ont référé à la Politique en soins palliatifs de fin de vie, adoptée en 2004 «qui détermine les façons de faire du réseau de la santé dans de tels cas». Dans cette politique, on apprend que: «du côté des centres hospitaliers et des centres d'hébergement et de soins de longue durée, les ajustements pour s'adapter aux soins de fin de vie (chambre individuelle, ajout de personnel infirmier, etc.) ne doivent pas entraîner de frais supplémentaires aux usagers.»
M. Ferenczi a donc déposé une plainte à ce sujet au commissaire local à la qualité des services du CSSS de la Haute-Yamaska en exigeant le remboursement des frais non seulement pour lui mais pour tous les autres usagers dans la même situation depuis l'adoption de la politique en 2004.
Incohérence
En menant son enquête, le commissaire local, Yves Bélanger, a découvert l'existence d'une circulaire, émanant elle aussi du ministère de la Santé qui dicte une tout autre façon de faire aux établissements de santé. «Lorsqu'une personne a demandé son admission dans une chambre privée ou semi-privée et qu'une telle chambre est attribuée et réservée à son nom, elle doit en payer le tarif prévu, même si son séjour dans une telle chambre (...) devient médicalement nécessaire», peut-on lire.
«Aucune exception n'est faite pour les chambres en soins palliatifs, poursuit le commissaire dans sa décision. Présentement en Montérégie et selon les informations que j'ai recueillies, il n'y a pas d'homogénéité, d'un CSSS à l'autre, dans la facturation des chambres en soins palliatifs», constate-t-il.
Yves Bélanger précise que l'Agence de la santé et des services sociaux de la Montérégie n'a pas retenu de mesures visant la gratuité dans son plan pour mettre en oeuvre la politique de soins palliatifs. Il note que l'hôpital de Granby ne reçoit pas de financement particulier pour ces lits. Il estime que les «droits» de M. Ferenczi ont été respectés et que le traitement de son dossier a été effectué «selon les règles et procédures en vigueur» émises par le Ministère.
Il recommande toutefois à la directrice des services financiers du centre de santé de demander des clarifications à ce sujet au ministère de la Santé.
Clarification
La présidente-directrice générale de l'Agence de la santé et des services sociaux de la Montérégie, Claire Pagé, demande elle aussi des clarifications. La plainte de M. Ferenczi a mis au jour des pratiques très différentes d'un hôpital à l'autre à ce sujet, ce que l'Agence ignorait.
«Ça manque de cohérence? Je suis d'accord avec vous», reconnaît Mme Pagé d'entrée de jeu. L'Agence souhaite qu'on harmonise la politique et la circulaire. «Mais ça doit provenir du Ministère», précise-t-elle.
En demandant la gratuité pour les chambres privées en soins palliatifs, M. Ferenczi soulève un débat complexe. «Vous savez, dans un centre hospitalier, il y a bien des gens qui meurent. Il y en a qui décèdent d'une crise cardiaque, à la suite d'une chirurgie ou d'une maladie dégénérative. (Ces patients ne sont pas hospitalisés en soins palliatifs). Où est-ce qu'on va tirer la barre?», questionne-t-elle. «Ce n'est pas aussi simple que ça à trancher», fait-elle valoir.
Une demande légitime
M. Ferenczi reste convaincu de la légitimité de sa demande. «Il y a une différence énorme entre les soins palliatifs et le reste de l'hôpital, soutient-il. Dans les autres départements, il y a des gens qui souffrent, mais ils ont tous espoir de guérir et de retourner chez eux. Aux soins palliatifs, on a dit aux malades: on regrette, on ne peut plus rien faire pour vous», retient-il.
«On torture psychologiquement les gens en les mettant avec d'autres mourants. Et on fait ça à des centaines de gens au Québec», déplore-t-il. Devant la confusion, les hôpitaux devraient arrêter de facturer les gens pour des chambres simples, estime le Granbyen qui a déjà porté sa cause devant le Protecteur du citoyen. M. Ferenczi a bien hâte de savoir si les établissement facturent les usagers ailleurs au Québec, ou si cette pratique est exclusive à la Montérégie.
Le député de Shefford, François Bonnardel, rappelle que les questions soulevées par Edmond Ferenczi pourront être abordées dans le cadre de la commission itinérante qui sera mise en place pour aborder le droit de mourir dans la dignité qui se penchera aussi sur l'euthanasie. «M. Ferenczi a soulevé un débat qui mérite notre attention mais qui a un coût. Combien de millions faudrait-il mettre sur la table?», s'interroge le député, rappelant par ailleurs que les «hôpitaux en arrachent» financièrement.