Le lac Brome fermé malgré des tests négatifs

Les contre-interrogatoires menés hier par l'avocat de Gerry Moar, Me Owen Falquero, ont permis de découvrir que la Direction de la santé publique n'a pas tenu compte des résultats de tests scientifiques en 2006 dans sa décision de fermer le lac Brome en raison de la présence de cyanobactéries.

Tous les résultats d'analyse des échantillons d'eau prélevés dans le lac Brome durant sa fermeture en 2006 en raison de l'éclosion d'algues bleues, hormis un seul, démontraient que les taux de toxicité ne dépassaient pas les seuils de dangerosité pour les humains.


La Direction de la santé publique de la Montérégie n'a toutefois pas cru bon s'y référer. L'organisme ne se fiait alors qu'à des observations visuelles pour prendre la décision de fermer ou non un lac, a-t-on appris hier lors de la deuxième journée du procès intenté par Gerry Moar contre le ministère de la Santé et des Services sociaux à la Cour des petites créances. Le propriétaire de la Marina Knowlton réclame 6800 $ du MSSS pour perte de profits alors que les activités récréatives ont été interdites sur le lac.

 



Les deux témoins de la partie défenderesse, Patrick Chevrette, technicien au ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs, et Nathalie Brault, microbiologiste à la Direction de la santé publique de la Montérégie, ont tour à tour confirmé que les échantillons d'eau prélevés dans le lac Brome entre le 17 août 2006, date de fermeture du plan d'eau, et le 16 octobre se situaient en dessous des limites acceptables pour sa consommation et pour s'adonner à des activités récréatives. Un seul des 12 échantillons d'eau pris durant cette période dépassait les seuils, soit celui prélevé le 18 septembre près du barrage débouchant sur la rivière Yamaska Nord.

Lors de son témoignage, Mme Brault a expliqué que le protocole utilisé par les différentes directions de la santé publique au Québec stipulait que des restrictions d'utilisation pouvaient être décrétées sur les plans d'eau sur la seule base d'observation de cyanobactéries, entre autres la présence d'eau verdâtre près du rivage, de filaments dans l'eau et d'écume. « Peu importe les niveaux de toxine, on se fiait au visuel «, a-t-elle affirmé.

La littérature scientifique connue à l'époque par les autorités gouvernementales, a indiqué Mme Brault, invitait à la prudence lorsque la présence d'algues bleues était signalée. Elle a cité plusieurs cas en Amérique du Sud et aux États-Unis où des humains ont été malades après avoir ingurgité de l'eau contaminée par des cyanobactéries. Le développement et les effets de ces bactéries aquatiques sont « imprévisibles «, a notamment dit Mme Brault pour justifier l'approche préconisée par le protocole.

Traces de cyanobactéries



En contre-interrogatoire, l'avocat de M. Moar, Me Owen Falquero a résumé le tout en une seule phrase : « Le visuel l'emporte sur la science «, a-t-il lancé en guise de question à Mme Brault. Celle-ci a répondu que les photos prises à plusieurs endroits sur le lac, sur une période de trois mois, montraient des traces évidentes de cyanobactéries. D'où la décision de la DSP de la Montérégie de ne pas rouvrir le lac aux activités récréatives, malgré des tests négatifs.

Cette révélation ne mine pas la position défendue par le MSSS, soutient son procureur, Me Luc De La Sablonière. « La recherche et les données scientifiques que nous avions nous laissaient croire qu'ils y avaient de fortes chances que l'éclosion se poursuive «, a-t-il dit à la fin de l'audience.

Me De La Sablonière complétera sa preuve ce matin avec le témoignage de la Dre Jocelyne Sauvé, directrice de la DSP de la Montérégie. Les deux parties devraient ensuite présenter leur plaidoirie au juge Jean-Pierre Bachand.