L'entrepreneur granbyen a été inondé d'appels téléphoniques dénonçant des produits portant son nom. Le hic? Il n'a rien à voir, de près ou de loin, avec l'aliment concerné.
Les consommateurs qui ont fait valoir leur mécontentement se plaignaient en effet du sirop biologique Bernard, qui défraie la manchette depuis hier matin. Fabriquée en Beauce, cette concoction ne contient que 5 % de sirop d'érable pur, mais possède une facture visuelle qui, par son emballage métallique, rappelle celui de son cousin vendu plus de deux fois plus cher en épicerie.
«J'ai eu un paquet de téléphones qui me disaient «ouache!» à propos de ce sirop-là, alors il a fallu que j'explique que ce n'était pas notre sirop, raconte Réal Bernard. Moi, je ne vends mes produits qu'à l'érablière même, alors les gens se disaient qu'au lieu de se rendre à la cabane, ils pouvaient enfin l'acheter chez Loblaws. Mais il ne faut pas se tromper, ce n'est pas du tout la même chose!»
Transformé par les Industries Bernard et fils, établies à Saint-Victor, ce sirop vendu seulement chez Provigo, Loblaws et Maxi serait très populaire à Granby depuis sa mise en vente la semaine dernière. Chez tous ces détaillants, aucun chiffre ne nous a toutefois été dévoilé quant à l'engouement en question.
Rappelons tout de même qu'à l'échelle de la province, une moyenne de 1,4 boîte aurait été vendue chaque seconde au cours du dernier week-end selon des chiffres rapportés par le quotidien La Presse hier matin .
Les producteurs tranquilles
Il demeure que malgré la possible confusion entre ce produit et le sirop d'érable pur, les producteurs de la région interrogés hier se sont dits confiants que cette méprise ne menacera pas leur chiffre d'affaires.
«Peut-être que les plus jeunes ne feront pas la différence, mais je ne croirais pas que les personnes plus âgées délaisseront la tradition de la cabane à sucre et du sirop d'érable, reprend Réal Bernard. En fait, je ne pense pas que ça berne grand monde. De toute façon, avec 5 % de sirop d'érable, ça donne à peine une once et demie par boîte, alors ça revient cher de payer 4 $ pour ça. C'est un peu rire du monde.»
«Ce qui me chicotte, a-t-il poursuivi, c'est qu'on laisse entrer un produit semblable sur le marché quand on sait que le sirop d'érable est un produit fabriqué ici. J'espère seulement qu'ils ne commenceront pas à l'exporter.»
Quant à lui, Pierre Brunelle, de l'érablière Brunelle à Bromont, affirme n'avoir jamais entendu parler de ce sirop bio avant ce week-end. Concédant que ce n'était «pas une bonne nouvelle pour l'industrie», il assure que les consommateurs devraient aisément faire la différence entre le produit pur et celui modifié.
Benoît Choinière, de l'érablière G.A. Choinière, à Roxton Pond, abonde dans le même sens, rappelant que «les gens qui aiment le goût du sirop d'érable vont toujours y revenir.»
«Ce n'est quand même rien d'autre que du sirop de table», note-t-il.
Tous ont néanmoins reconnu que les Industries Bernard et fils étaient dans leur droit total et entier de transformer du sirop d'érable pour en faire un produit moins cher et de moins bonne qualité. C'était plutôt le fait que son emballage suscite la confusion avec le produit de base qui dérangeait les acériculteurs concernés.