Les commerces de détail ont la possibilité d'ouvrir leurs portes le lendemain du jour de l'An depuis l'adoption par décret de modifications à la Loi sur les heures d'ouverture, le 10 décembre dernier. Cet amendement, avait alors déclaré le ministre du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation, Raymond Bachand, «s'adapte autant aux besoins des consommateurs qu'à ceux des commerçants».
Les Galeries ouvertes
«Nous avons attendu de voir ce que nos compétiteurs feraient avant de prendre notre décision, explique Nicolas D'Aoust, directeur des Galeries de Granby. Quand nous avons vu que Saint-Bruno et Saint-Hyacinthe ouvraient leurs portes, on a décidé d'ouvrir nous aussi.»
M. D'Aoust est bien conscient que cette décision n'a pas fait l'unanimité au sein des employés et des exploitants de commerces des Galeries, mais il maintient qu'il s'agit avant tout d'une décision commerciale prise avec l'aval des bannières qui occupent le centre commercial.
«Tout ce que nous exigeons, c'est que les commerces des Galeries soient ouverts le vendredi 2 janvier, de 9h30 à 21h, dit-il. Nous n'imposons aucun nombre minimum d'employés aux commerces. Mais on s'attend toutefois à ce que ce soit une journée très achalandée.»
La plupart des commerces qui ceinturent le centre commercial, dont le Future Shop et le Winners, mentionne M. D'Aoust, ont aussi décidé d'ouvrir leurs portes le 2 janvier et ce, même s'ils ne sont pas liés à la décision des Galeries de Granby.
Quant aux autres commerces de la région, s'ils ne font pas partie d'une bannière, la décision d'ouvrir ou non leurs portes le 2 janvier revient à leurs propriétaires.
Ridicule
Diane Levreault, copropriétaire de la tabagie Tabazone des Galeries de Granby, qualifie cette décision de «complètement ridicule».
«D'après moi, le ministre Bachand a dû céder aux pressions des grosses chaînes pour accepter ça. Je me demande où était la ministre de la Famille quand il a pris sa décision», lance la dame, arguant que l'ouverture des commerces le 2 janvier constituait une véritable entorse aux efforts de conciliation travail-famille.
Diane Levreault a d'ailleurs adressé une lettre au ministre Bachand pour lui faire part de ses récriminations (Voir Opinion des lecteurs p. 15)
L'amendement de la Loi sur les heures d'ouverture à deux semaines de Noël était aussi, de l'avis de Mme Levreault, tout à fait inapproprié.
«Les horaires de travail des Fêtes étaient déjà prêts dans la plupart des commerces, dit-elle. Avec un aussi court préavis, beaucoup de commerçants ont de la difficulté à trouver des gens pour travailler ce jour-là parce que leurs employés ont prévu aller à l'extérieur. En plus, depuis le 1er décembre, on se tape des heures d'ouverture allongées. Les gens travaillent très dur à ce temps-ci de l'année, il me semble que deux jours de congé de suite au début janvier, c'est pas trop demander.»
Serge Tremblay, propriétaire du Sports Experts, se fait quant à lui plus nuancé.
«Je comprends que ça puisse déplaire à certains, mais moi, ça ne me dérange pas trop, lance-t-il. J'ai un commerce qui vend des produits d'hiver. Pour moi, c'est le temps de faire des ventes.»
M. Tremblay a tout de même donné congé à tous ses employés réguliers pour ne faire entrer que des temps partiels au travail.
«Ça fait leur affaire, dit-il. C'est le temps pour eux de faire des heures.»
Colère
L'ouverture des commerces le 2 janvier soulève la colère de certains employés qui tentent par tous les moyens de faire reculer la direction du centre commercial.
C'est le cas des salariés de la boutique Vincent d'Amérique qui, à l'instar de leurs confrères d'autres centres commerciaux, font circuler une pétition pour demander que les Galeries de Granby demeurent fermées le 2 janvier.
«On a déjà près d'une centaine de noms sur la pétition, indique Élie Rivard, et on n'a fait que la moitié du centre d'achats. Tout le monde est fâché de cette décision.»
Ils comptent déposer la pétition lundi à la direction des Galeries de Granby et, si celle-ci la rejette, ils espèrent à tout le moins faire retarder l'ouverture des portes de quelques heures ce jour-là.
«Sinon, on espère qu'ils arrangent ça pour l'an prochain», ajoute Isabelle Howse.
Fait accompli
Jeanne Coiteux, gérante de la boutique Intuitions, ne partage pas l'enthousiasme de la jeune équipe du Vincent d'Amérique.
«Ça ne changera rien, on est placés devant un fait accompli», déplore-t-elle.
La dame de 86 ans s'attend donc à devoir entrer au travail le lendemain du jour de l'An.
«J'ai pas ben le choix, il faut que la gérante soit là.»
Mme Coiteux estime que les commerces perdront de l'argent en ouvrant ce jour-là.
«On fait juste déplacer les achats, maintient-elle. Les gens n'auront pas plus d'argent à dépenser parce qu'on est ouvert le 2 janvier. J'espère au moins qu'ils vont faire un peu de publicité pour qu'il y ait des clients. Sur l'horaire qui est affiché dans les portes, c'est encore écrit qu'on est fermés le 2 janvier.»
Selon elle, le gouvernement a cédé aux pressions de géants tels que Wal-Mart en acceptant l'ouverture des commerces le 2 janvier.
«Ils sont déjà rendus à ouvrir les Wal-Mart 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 aux États-Unis. Je ne serais pas surprise que ça devienne comme ça ici, conclut-elle. Il n'y a plus grand-chose qui me surprend.»