L'entrepreneur fait fi des règlements

Seulement jeudi, une centaine d'arbres attendaient d'être chargés sur des camions. La coupe a débuté lundi et s'est poursuivie tous les jours, a confirmé un employé rencontré sur place.

Des centaines de feuillus et de conifères sont abattus illégalement depuis lundi à Dunham. Informée mercredi, la municipalité n'est pas intervenue pour faire cesser les coupes, faisant fi de son propre règlement obligeant l'obtention d'un permis pour ce type d'activité.


Les travaux forestiers sont exécutés près du chemin Symington, à l'est du village de Dunham. L'entreprise responsable, une compagnie à numéro (9034-8822 Québec Inc.) dont les actionnaires sont des membres de la famille Champigny de Mansonville et Gilles Ducharme de Cowansville, n'a pas perdu de temps pour exploiter l'immense forêt qui s'y trouve. Propriété de la famille Hall, la terre de 122 hectares (300 acres) a changé de mains le 28 octobre, une transaction de 720 000 $, indique le registre foncier du Québec. Lundi dernier, les équipements forestiers étaient déjà en action.

 



Le maire de Dunham était mal à l'aise hier de parler de cette coupe. Il reconnaît qu'aucun permis autorisant les travaux n'a été émis. Du même souffle, il assure que tout rentrera dans l'ordre dans quelques jours. «Nous les avons rencontrés hier (jeudi) et ils ont dit qu'ils allaient faire leur demande de permis. On devrait avoir ça aujourd'hui (vendredi) ou lundi», a indiqué Marcel Poirier.

Le maire refuse d'y voir un cas de violation d'un règlement municipal. Il parle plutôt d'un «manque de communication» pour expliquer la situation. L'inspecteur municipal, a-t-il souligné, aurait été avisé de la coupe il y a quelques semaines par un des actionnaires de la compagnie. «Il ne s'en souvenait plus, mais ça lui est revenu», a expliqué M. Poirier.

Impossible de valider cette information. L'inspecteur municipal Claude Ledoux n'a offert aucune coopération. «Je n'ai aucun commentaire à faire», a-t-il dit lorsque croisé à l'hôtel de ville jeudi après-midi.

Difficile également d'obtenir les commentaires de l'entreprise fautive. Son représentant, Roger Lessard, nous a d'abord enjoint de ne pas nous mêler de ses affaires avant de nous référer à la municipalité.



Chemin forestier

La demande de permis a finalement été reçue hier en milieu d'après-midi, a confirmé le directeur général de la municipalité, Pierre Loiselle. L'autorisation a été donnée pour l'aménagement d'un chemin forestier uniquement, a précisé M. Loiselle. «On les a avisés de ne rien faire d'autres avant de déposer le plan complet.»

Joint hier matin, l'ingénieur forestier Olivier Côté, mandaté par la compagnie, a indiqué qu'il déposera d'ici une à deux semaines le plan des travaux sylvicoles prévus. Le document détaillera les secteurs où l'entreprise bûchera au cours des prochaines années ainsi que les essences d'arbres visés. L'entreprise entend se prévaloir de son droit d'abattre 30 % des arbres dans un peuplement (connu comme étant une coupe d'éclaircie), en conformité avec le règlement de la municipalité.

Aucune nouvelle coupe d'arbres dans les secteurs touchés ne pourra être réalisée avant 15 ans. «Mon rôle est d'améliorer la forêt en lui permettant de croître. On va la gérer. On ne va pas la saccager», a dit M. Côté.

Dans son droit

La coupe d'arbres réalisée durant la semaine visait à élargir un sentier de véhicules tout-terrain pour en faire un chemin forestier, soutient M. Côté. Qui plus est, affirme l'ingénieur forestier, le propriétaire de la terre est dans son droit d'agir sans permis. «Rien ne l'empêche de couper quelques arbres», a-t-il dit.



M. Côté est toutefois d'accord qu'il existe une grande différence entre quelques arbres abattus et des centaines. Il aurait été préférable, a-t-il reconnu, de n'avoir démarré les travaux qu'une fois le permis obtenu.

Mardi, M. Côté dit s'est entretenu avec Claude Ledoux. L'inspecteur municipal lui aurait dit d'attendre d'avoir tous ses documents prêts avant de déposer sa demande de permis.

On ignore combien d'arbres ont été coupés. Toutefois, jeudi après-midi, un employé rencontré sur place, Conrad Ducharme, a expliqué que l'abattage a débuté lundi et s'était poursuivi tous les jours. Lors de notre passage, une centaine d'arbres attendaient d'être chargés sur des camions. Destination: la scierie de Mansonville, propriété des Champigny, ainsi que des usines de pâtes et papier en Estrie.

Le plan des travaux sylvicoles, explique M. Côté, prévoit l'aménagement d'un chemin forestier long de 100 mètres ainsi que l'aménagement d'une aire d'empilement des billots. Le chemin sera recouvert de gravier pour en permettre l'accès à des camions de transport de billots.